DE DREYFUS A LA GUERRE

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'Les français se sont déchirés entre eux sans voir que la guerre les attendait pour les massacrer"
Frédéric Fabre docteur en droit

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- L'AFFAIRE DREYFUS

- LA RÉPUBLIQUE ANTICLÉRICALE S'IMPOSE

- LA "BELLE EPOQUE" VA VERS LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE

- LES TÉMOIGNAGES DANS LA LITTÉRATURE, LA CHANSON ET LES FILMS

- LA LETTRE D'EMILE ZOLA "J'ACCUSE" PARUE DANS L'AURORE DU 13 JANVIER 1898

- LES LIENS EXTERNES

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L'AFFAIRE DREYFUS

à Sandra

1894

Septembre: Affaire Dreyfus: le "bordereau" est découvert à l'ambassade d'Allemagne. Madame Bastian, une femme de ménage qui ne savait ni lire ni écrire vide les poubelles et les rapporte aux services français des statistiques chargés aussi du renseignement et de l'espionnage. Le "Bordereau" est une lettre-missive, partiellement déchirée en six grands morceaux, écrite sur du papier pelure, non signée et non datée. Elle est adressée à l'attaché militaire allemand en poste à l’ambassade d’Allemagne, Max von Schwarzkoppen. Elle établit que des documents militaires confidentiels, mais d'importance relative, étaient sur le point d'être transmis à une puissance étrangère.
 
17-22 septembre: Le Congrès corporatif de Nantes adopte le principe de grève générale.
 
6 octobre: Le problème pour le Gouvernement est de justifier sa possession du bordereau sans déclencher la guerre avec l'Allemagne. Le ministre des affaires étrangères Hanotaux qui veut renforcer l'alliance avec l'Allemagne veut régler cette affaire avec discrétion. Pour étouffer l'affaire, le Gouvernement aurait pu envoyé silencieusement l'officier auteur de cette lettre se faire tuer dans une colonie.  Les documents transmis n'étaient que d'une importance secondaire. Cette affaire n'avait pas au fond, une importance capitale. L'antisémitisme, le boulangisme, la défense d'une armée bafouée en 1870 et la protection des droits de la défense sont les causes réelles de l'ampleur phénoménale de cette affaire qui va créer une coupure à l'intérieur même de chaque parti. Des hommes de gauche comme Rochefort seront antidreyfusards par fidélité au boulangisme. A droite, Paul Valery, Octave Mirbeau et  Raymond Poincaré se révèlent dreyfusard.
En 1894, le ministre, le général Mercier, violemment attaqué dans la presse pour son incompétence, veut tirer parti de cette affaire secondaire pour rehausser son image. Il a diligenté deux enquêtes secrètes, l’une administrative et l’autre judiciaire. Pour trouver le coupable, le colonel Fabre nommé enquêteur, doit restreindre le cercle de ses recherches à un suspect en poste ou un ancien collaborateur à l’État-major, nécessairement artilleur et officier stagiaire. Le capitaine Alfred Dreyfus est l'un des seuls à répondre à tous ces critères prédéterminés. De plus, il est mal aimé par ses collègues du quatrième bureau car né à Mulhouse, il est alsacien donc arbitrairement jugé proche des allemands !

13 octobre: Dreyfus est convoqué en civil à l'État major pour lui faire faire des écritures. Le commandant du Paty de Clam, homme original qui se pique d’expertise graphologique compare les écritures de Dreyfus avec le bordereau. Il conclut d’emblée à l'identité des deux écritures. Après une journée de travail complémentaire, il assure dans un rapport que, malgré quelques dissemblances, les ressemblances sont suffisantes pour justifier une enquête. Dreyfus est donc «l'auteur probable» du bordereau pour l'État-major.

15 octobre: Du Paty de Clam tente de suggérer le suicide à Dreyfus, en plaçant un revolver devant lui, mais l'accusé refuse d'attenter à ses jours, affirmant qu'il « veut vivre afin d'établir son innocence ». L'espoir des militaires est déçu. le général Mercier fait arrêter le capitaine et l'inculpe d'intelligence avec l'ennemi afin qu'il soit traduit devant un Conseil de guerre. Dreyfus est incarcéré à la prison du cherche midi.

3 décembre: Joseph Reinach a été un proche de Gambetta dont il a été le chef de cabinet. Il est élu député de Digne en 1889. Au moment de l'arrestation d'Alfred Dreyfus, Joseph Reinach a l'intuition de son innocence. Il fait une démarche auprès du président de la République, Casimir-Perier, afin que le capitaine Dreyfus ne soit pas jugé à huis clos. Il fait campagne dans "Le Siècle" d'Yves Guyot, et ses articles susciteront pendant toute l'affaire, des réactions violentes dans la presse nationaliste et antidreyfusarde.

12 décembre: Les troupes françaises occupe Tamatave à Madagascar.

19 Décembre: Le Procès Dreyfus commence dans un huis clos pratique pour cacher un dossier vide. L'accusé lui même clame son innocence, et se défend point par point avec énergie et logique. Ses déclarations sont appuyées par une dizaine de témoignages à décharge. L'absence de mobile pour le crime parait dans le dossier d'accusation. Dreyfus était un officier très patriote et très bien noté par ses chefs, et surtout très riche, il n'avait donc aucune raison tangible de trahir. La justification par la judéité de Dreyfus, seule retenue par la presse de droite, ne pouvait l'être par un tribunal. Les témoins militaires du procès alertent le commandement sur les risques d'acquittement. Dans cette éventualité, la Section de statistiques avait préparé un "dossier secret", contenant quatre preuves "absolues" de la culpabilité du capitaine Dreyfus, accompagnées d'une note explicative. Celui-ci est remis au début du délibéré, en toute illégalité et sans qu'il ne puisse être discuté, au président du Conseil de guerre le colonel Émilien Maurel, sur ordre du ministre de la Guerre, le général Mercier.
 
22 décembre: À l'unanimité des sept juges, Alfred Dreyfus est condamné pour trahison "à la destitution de son grade, à la dégradation militaire, et à la déportation perpétuelle dans une enceinte fortifiée", soit au bagne en Guyane. Dreyfus n'est pas condamné à mort car la peine capitale est abolie pour crime politique. Pour les autorités, la presse et le public, les quelques doutes d'avant procès sont dissipés. La culpabilité est certaine; à droite comme à gauche, l'abolition de la peine de mort pour crime de trahison est regrettée. L'antisémitisme atteint des sommets dans la presse et se manifeste dans toutes les couches sociales de la  population française. Jean Jaurès regrette la douceur de la peine dans une adresse à la Chambre, et écrit : "un troupier vient d'être condamné à mort et exécuté pour avoir lancé un bouton au visage de son caporal. Alors pourquoi laisser ce misérable traître en vie?"
 
1895
 
5 janvier: Le capitaine Dreyfus est dégradé dans la cour de l'École militaire. Les témoins signalent "la grande dignité" ou "l'invraisemblable passivité" de Dreyfus. L'affaire de la légende des aveux commence: avant sa dégradation, dans le fourgon qui l'amenait, Dreyfus aurait confié sa traîtrise au capitaine Lebrun Renault en présence du capitaine d'Attel. voici le propos rapportés par le capitaine Lebrun Renault: "Je suis innocent. Dans trois ans on reconnaîtra mon innocence. Le ministre le sait: il me l'a fait dire, il y a quelques jours dans ma cellule, par le commandant Paty de Clam et il sait que, si j'ai livré des documents, ils étaient sans importance et que c'était pour m'en procurer de plus sérieux, de plus importants"
 
photo cc-by Philipp Weigell thanks him !  
 
Le capitaine d'Attel a été trouvé mort le 1er octobre 1895 sans rien dire. Il ne reste que la parole du capitaine Lebrun Renault. Personne d'autre n'était dans le fourgon et personne ne peut savoir ce qu'a réellement déclaré Dreyfus. L'aveu qui n'est pas un aveu, d'un prisonnier qui craint pour sa famille alors qu'il part pour le bagne, ne peut avoir aucune valeur de preuve. Pourtant, les antidreyfusards, face à un dossier d'accusation vide, se tiendront sur les prétendus aveux alors qu'au pire, selon le capitaine Lebrun Renault, il aurait agi sur ordre dans une mission d'espionnage.

Du fait de la nature de l'affaire touchant à la sécurité nationale, le prisonnier est mis au secret dans une cellule en attendant son transfert.

14 janvier: Les troupes françaises occupe Manjunga à Madagascar. Le ministère Dupuy tombe sur les lois scélérates.

16 janvier: Casimir-Perier démissionne de la Présidence de la République. Il se voit ignoré par les ministres qui ne le consultent pas avant de prendre des décisions et ne l’informent pas des événements politiques, surtout dans le domaine des affaires étrangères. Il ne veut pas être une potiche chargée d'inaugurer des chrysanthèmes. 
 
17 janvier: Félix Faure est élu président de la République.
 
Dreyfus est transféré au bagne de l'île de Ré, où il est maintenu plus d'un mois. Il a le droit de voir sa femme deux fois par semaine, dans une salle allongée, chacun à un bout, le directeur de la prison au milieu.

26 janvier: Ribot forme son troisième ministère.

21 février: Dreyfus part pour l'île du Diable sur le vaisseau Ville-de-Saint-Nazaire.

12 mars: Après une traversée pénible de quinze jours, le navire mouille au large des îles du Salut. Dreyfus reste un mois au bagne de l'île Royale avant son transfèrement à l'île du Diable.

14 avril: Dreyfus est débarqué à l'île du Diable. Avec ses gardiens, il est le seul habitant de l'île, logeant dans une case de pierre de quatre mètres sur quatre. Hanté par le risque de l'évasion, le commandant du bagne fait vivre un enfer au condamné alors que les conditions de vie sont déjà très pénibles. Dreyfus tombe malade, secoué par les fièvres qui s'aggraveront d'année en année.

16 avril: La Taxe d'abonnement sur les biens des congrégations est votée.
 
6 mai: Le général Duchesne arrive à Madagascar.
 
16 juin: Un décret institue le gouvernement général de l'Afrique-Occidentale française (AOF).
 
23-26 septembre: La C.G.T réunit son congrès constitutif à Limoges.
 
30 septembre: Tananarive est prise. La reine Ranavalo capitule et accepte le protectorat français sur Madagascar.
 
1er octobre: Le Traité franco-malgache est signé.
 
28 octobre: Le ministère d'Alexandre Ribot  tombe.
 
1er novembre: Léon Bourgeois forme son ministère.
 
12 novembre: Le marquis Albert de Dion crée l'automobile club.

1896

5 janvier:  L'Accord franco-britannique sur le Siam est signé.

18 janvier: Un acte de prise de possession de Madagascar se substitue au protectorat.
 
Mars: Le télégramme appelé le «petit bleu» adressé par Schwartzkoppen à Ferdinand Walsin Esterhazy est intercepté.
 
23 avril: Le ministère Bourgeois chute.
 
29 avril: Jules Méline forme son ministère. Hanotaux retrouve son portefeuille de ministre des affaires étrangères et prône le renforcement de l'alliance avec la Russie qui deviendra un pont pour l'alliance avec l'Allemagne.
 
3-10 mai: Les Élections municipales enregistrent de nombreux succès des socialistes.
 
24 mai: Le Congrès ouvrier chrétien se réunit à Reims.
 
30 mai: Dans son discours à Saint-Mandé, Alexandre Millerand affirme que le socialisme doit conquérir les pouvoirs publics par le suffrage universel et non par des moyens révolutionnaires.
 
Juillet: le lieutenant-colonel Georges Picquart constate la similitude de l'écriture du bordereau et celle d'Esterhazy, il alerte en vain ses supérieurs. Ayant accès au dossier secret, il s'aperçoit qu'il est vide. Ses supérieurs interrogés donnent pour toute réponse l'envoi de Picquart en mission dans l’Est de la France pour l'éloigner.
 
6 août: La loi d'annexion de Madagascar est votée. Madagascar devient colonie.
 
24 août: Le Congrès ecclésiastique se réunit à Reims.
 
30 septembre: L'Italie reconnaît dans une Convention, la souveraineté de la France sur la Tunisie.
 
28 septembre: Gallieni prend ses fonctions de gouverneur général de Madagascar.
 
5-8 octobre: Le Tsar russe Nicolas II et son épouse viennent en visite officielle à Paris.

1er novembre: Le commandant Henry est antisémite et membre du bureau des statistiques. Il fabrique un faux, le «faux Henry». En conservant l'entête et la signature d'une lettre quelconque de Panizzardi attachée militaire italien à Paris, il rédige lui-même le texte central censé être envoyé au colonel von Schwartzkoppen:

« J'ai lu qu'un député va interpeller sur Dreyfus. Si on demande à Rome nouvelles explications, je dirai que jamais j'avais des relations avec ce Juif. C'est entendu. Si on vous demande, dites comme ça. Car il ne faut pas que on sache jamais personne ce qui est arrivé avec lui. » signé Alexandrine le nom de code de Panizzardi.

6 novembre: Le dreyfusard Bernard Lazare publie à Bruxelles «Une erreur judiciaire, la vérité sur l'affaire Dreyfus».

Décembre: Une enquête aboutit à un non lieu en faveur d'Esterhazy.
 
1897

Janvier: Picquart est envoyé en Tunisie. Une enquête administrative débute contre lui. Le commandant Henry, mène de son propre chef, une opération d'intoxication afin de compromettre le lieutenant colonel Piquart. Il se livre à diverses malversations dont la fabrication d'une lettre le désignant comme l’instrument du «syndicat juif» voulant faire évader Dreyfus, le truquage du «petit bleu» pour faire croire que Picquart a effacé le nom du réel destinataire et la rédaction d'un courrier nommant Dreyfus en toutes lettres.

28 Février: Gallieni abolit la monarchie à Madagascar.

Mars: La mission Marchand part vers Fachoda sur la demande du ministre des affaires étrangères Hanotaux.

Août: Félix Faure voyage officiellement en Russie. Le ministre des affaires étrangères Hanotaux l'accompagne.

10 octobre: Méline fait un discours  d'apaisement à l'égard des catholiques à Remiremont.

14 octobre: Clément Ader fait son premier vol à Satory.

30 octobre: Le vice-président du Sénat, Scheurer-Kestner révèle au ministre de la Guerre ses convictions sur l'innocence de Dreyfus. Zola publie un article en sa faveur dans le Figaro.

15 novembre: Mathieu Dreyfus, le frère du capitaine porte plainte auprès du ministère de la Guerre contre Esterházy. La polémique étant publique, l'armée n'a plus d'autre choix que d'ouvrir une enquête.

7 décembre: Scheurer-Kestner interpelle le Gouvernement au Sénat en faveur de Dreyfus mais son intervention échoue. Méline lui répond "Il n'y a pas d'affaire Dreyfus. Il n'y a pas en ce moment et il ne peut pas y avoir d'affaire Dreyfus".

Décembre: Une nouvelle enquête aboutit à un non lieu en faveur d'Esterhazy.

Le Congrès démocrate chrétien est réuni à Lyon.

1898

10 janvier: Esterházy demande lui-même à passer en jugement. Il se constitue prisonnier à la veille du procès devant le Conseil de Guerre qui jugera à huis clos. Les constitutions de parties civiles demandées par Mathieu et Lucie Dreyfus leur sont refusées. Les trois experts en écritures ne reconnaissent pas l'écriture d'Esterházy dans le bordereau et concluent à la contrefaçon. L'accusé est applaudi. Les témoins à charge sont hués et conspués. Pellieux intervient pour défendre l'État-major sans qualité légale. Le véritable accusé est le colonel Picquart, sali par tous les protagonistes militaires de l'Affaire. Esterházy, est acquitté à l'unanimité dès le lendemain, après trois minutes de délibéré. Sous les vivats, il a du mal à se frayer un chemin vers la sortie où l'attendent 1 500 personnes. Par erreur, un innocent a été condamné, mais par ordre, le coupable est acquitté. Pour beaucoup de républicains modérés, c'est une atteinte insupportable aux valeurs fondamentales qu'ils défendent. L'acquittement d'Esterházy amène donc un changement de la stratégie dreyfusarde. Au libéralisme respectueux de Scheurer-Kestner, succède une action plus combative et contestataire. En réaction à l'acquittement, d'importantes et violentes émeutes antidreyfusardes et antisémites ont lieu dans toute la France.

11 janvier: Le vice-président du Sénat, Scheurer-Kestner perd sa vice présidence du Sénat.

13 janvier: "J'accuse" de Zola est publié par Clémenceau dans l'Aurore qui passe de 60 000 exemplaires à 300 000 exemplaires.

18 au 25 janvier: Suite à l'article de Zola, des manifestations antisémites se déroulent dans toutes les grandes villes de France: des devantures de magasins juifs sont détruites, des synagogues assiégées et des individus molestées. En Algérie, une chasse aux juifs est lancée. Max Régis propose «d'arroser de sang juif, l'arbre de la liberté».

7 février: Le procès de Zola débute aux assises. La diffamation envers une autorité publique est alors passible des Assises, alors que l'injure publique proférée par la presse nationaliste et antisémite n'amène que très peu de poursuites, et surtout quasiment aucune condamnation. Le ministre ne retient que trois passages de l'article, soit dix-huit lignes sur plusieurs centaines. Il est reproché à Zola d'avoir écrit que le Conseil de guerre avait commis une « illégalité [...] par ordre ». Le procès s’ouvre dans une ambiance de grande violence: Zola fait l'objet de violentes attaques, tout comme d'importants soutiens et félicitations. L'avocat de Zola, Fernand Labori est aidé pour préparer les questions techniques du procès par Léon Blum.

23 février: Fernand Labori fait citer environ deux cents témoins. La réalité de l'Affaire Dreyfus, inconnue du grand public, est diffusée dans la presse. Plusieurs journaux publient les notes sténographiques in extenso des débats au jour le jour, ce qui édifie la population. Celles-ci constituent pour les dreyfusards un outil primordial pour les débats postérieurs. Cependant, les nationalistes, derrière Henri Rochefort, sont alors les plus visibles et organisent des émeutes, forçant le préfet de police à intervenir afin de protéger les sorties de Zola à chaque audience. Ce procès est aussi le lieu d'une véritable bataille juridique, dans laquelle les droits de la défense sont sans cesse bafoués. De nombreux observateurs prennent conscience de la collusion entre le monde politique et les militaires. À l'évidence, la Cour a reçu des instructions pour que la substance même de l'erreur judiciaire ne soit pas évoquée. Le président Delegorgue prétextant l'allongement de durée des audiences, jongle sans cesse avec le droit pour que le procès ne traite que de la diffamation reprochée à Zola. Sa phrase «la question ne sera pas posée», répétée des dizaines de fois, devient célèbre. Zola est condamné à 3000 francs et un an de prison. Avec les frais, la dette s’élève à 7 500 francs payés par Octave Mirbeau.

24 février: Le lieutenant-colonel Picquart est réformé «pour faute grave dans le service». Dans L'Aurore du 27 février 1898 Clemenceau écrit: «Picquart est chassé de l'armée pour avoir voulu la justice.»

26 février: Un Duel oppose le chef du nationalisme antisémite rédacteur en chef de "La libre parole" Drumont au rédacteur en chef de l'Aurore, Clemenceau qui gagne. Tous les français ont une position dreyfusarde ou antidreyfusarde. Ce gouffre sépare les familles françaises et chaque parti politique aussi bien les partis de droite que les partis de gauche. La cause réelle de cette séparation n'est pas seulement l'amour ou le rejet d'une armée qui s'est ridiculisée en 1870 mais aussi et surtout l'antisémitisme. Les nationalistes antisémites pensaient que les juifs soutenaient les allemands car certains d'entre eux dirigeaient des banques à Frankfort. Ce raisonnement est étonnant vu le comportement des autorités allemandes contre leurs ressortissants juifs. Caran d'Ache un caricaturiste nationaliste dessine un dîner de famille qui commence bien avec cette maxime "Surtout ! ne parlons pas de l'affaire Dreyfus !" Puis le dîner se transforme en pugilat avec cette constatation: "....Ils en ont parlé....". 

2 avril: L'arrêt condamnant Zola est cassé pour vice de forme. La plainte aurait du être portée par le conseil de guerre et non par le ministre. Comme Zola ne peut pas être rejugé pour les mêmes faits en application du principe Non Bis in Idem soit pas deux fois pour la même chose, Les juges du Conseil de guerre, mis en cause par Zola, portent plainte pour diffamation. L’affaire est déférée devant les assises de Seine-et-Oise à Versailles où le public passe pour être plus favorable à l’Armée et plus nationaliste.

9 avril: La loi sur la réparation des accidents de travail est votée.
 
8-22 mai: Les Élections législatives donnent une large victoire à la Gauche avec 489 sièges, surtout à la gauche modérée qui obtient à elle seule 308 sièges, contre 96 sièges à la Droite républicaine ou monarchiste.  Jaurès perd les élections à Carmaux. Les socialistes comme Jules Guesde lui reproche son combat pour Dreyfus qui risque d'anéantir le socialisme en France alors que la vraie cause est la réhabilitation de la commune. Si Jules Guesde pense que Dreyfus est innocent, il considère que les socialistes n'ont pas à se mêler d'un combat qui ne regarde que deux fractions de la bourgeoisie.  L'essentiel est de gagner les élections ou de faire revenir les masses populaires au pouvoir.
 
4 juin: En réaction contre ce défaitisme de gauche, Ludovic Trarieux crée pour défendre Dreyfus, la Ligue française pour la défense des Droits de l'Homme et du citoyen appelée Ligue des droits de l'homme ou plus communément LDH.
La LDH défend auprès des partis de gauche, la défense des droits  individuels de chaque citoyen, déjà exposés dans la déclaration des droits de l'homme de 1789.
 
14 juin: Le ministère Méline chute. Méline refuse de discuter sur l'affaire Dreyfus et en ce sens rend un service aux antidreyfusards puisque sans discussion, comment réfuter les arguments de l'adversaire ?
 
La Convention franco-anglaise sur la délimitation des frontières africaines est signée.
 
28 juin: Brisson forme son Ministère.
 
5 juillet: La famille Dreyfus demande la révision du procès.
 
7 juillet: Le ministre de la Guerre, Jacques Godefroy Cavaignac, déclare à la chambre des députés produisant deux pièces sans savoir que ce ne sont que "les faux Henry": «La culpabilité de Dreyfus n'est pas établie seulement par le jugement qui l'a condamné ; elle est encore établie par une pièce postérieure de deux années, s'encadrant naturellement à sa place dans une longue correspondance dont l'authenticité n'est pas discutable; elle est établie par cette pièce de façon irréfutable (applaudissements). Messieurs, ce n'est pas tout. Il y a  encore un autre ordre de faits. Et je déclare, quant à moi, dans ma conscience, que, tout le reste vint-il à manquer, ce seul ordre de faits serait encore suffisant pour asseoir ma conviction de façon absolue; je veux parler des aveux de Dreyfus (mouvement). [...] Je n'ai plus qu'un vœu à formuler; ce n'est peut-être qu'une illusion; c'est, en tout cas, une espérance ardente: c'est que demain tous les Français puissent s'unir pour proclamer que cette armée, qui fait leur orgueil et qui fait leur espérance (vifs applaudissements), n'est pas puissante seulement de la résolution avec laquelle elle a su prendre, pour sauvegarder la sécurité nationale, les résolutions nécessaires, n'est pas forte seulement de la confiance du pays, mais qu'elle est forte aussi de la justice des actes qu'elle a eu à accomplir (applaudissements prolongés sur tous les bancs.- M. le ministre, en regagnant son banc, reçoit de nombreuses félicitations). » Il retourne ainsi l'effet du procès Zola au profit des antidreyfusard mais il a accepté de discuter. Les arguments peuvent être réfutés. Cette victoire signe en réalité la perte des antidreyfusards.
 
10 juillet: La mission Marchand s'installe à Fachoda au Soudan aux sources du Nil.
 
13 juillet: L’État-major arrête le lieutenant-colonel Picquart sous l'accusation de violation du secret professionnel. il restera près d'un an aux arrêts au Mont Valérien.
 
18 juillet: Lors de son second procès devant La Cour d'Assises de Seine et Oise, comme il va être condamné et sur les conseils de son avocat, Zola s'exile à Londres.
 
13 août: Suite aux articles de Jean Jaurès appelés "Les preuves" qui démontrent que la "nouvelle pièce" ne peut être qu'un faux de plus, Cavaignac demande à son cabinet de vérifier les documents. Le capitaine Cuignet, attaché au cabinet de Cavaignac, qui travaille à la lumière d'une lampe, observe que la couleur du léger quadrillage du papier de l'entête et du bas de page ne correspondent pas avec la partie centrale. Cavaignac tente encore de trouver des raisons logiques à la culpabilité et la condamnation de Dreyfus mais ne tait pas sa découverte du "faux Henry". Un conseil d'enquête est formé pour enquêter sur Esterházy, devant lequel celui-ci panique et avoue ses rapports secrets avec le commandant du Paty de Clam. La collusion entre l'État-major et le traître est révélée.
 
30 août: Cavaignac demande des explications au colonel Henry, en présence de Boisdeffre et Gonse. Après une heure d'interrogatoire mené par le ministre lui-même, Henry s'effondre et fait des aveux complets. Il est placé aux arrêts de forteresse au Mont Valérien.
 
31 août: Le colonel Henry se suicide en se tranchant la gorge avec un rasoir. Les nationalistes pensent qu'il a été assassiné par la police sur ordre du gouvernement. Charles Maurras excuse le faux par le concept de "faux patriotique" fabriqué pour faire éclater la vérité: Dreyfus est coupable. Cette thèse trouve l'adhésion générale. Maurras devient alors le chef naturel de la droite nationaliste.

7 septembre: Esterhazy fuit en Angleterre pour ne pas être arrêté. Il y restera jusqu'à sa mort en 1923 sans être jugé. Il sera d'abord le correspondant du journal La libre Parole de Drumont puis en 1908 il s'installe définitivement dans l'est de l'Angleterre à Harpenden et dissimule son identité sous le nom du comte Jean de Voilemont. Il sera correspondant du journal L'Éclair de 1911 à 1917.

19 septembre: L'anglais Kitchener rencontre Marchand à Fachoda. Il lui demande d'évacuer Fachoda. Marchand répond qu'il ne le fera que sur ordre de son gouvernement. C'est la crise de Fachoda entre la France et l'Angleterre.
 
24 septembre: La mission Foureau-Lamy part au Sahara.
 
26 septembre: Le gouvernement demande à la Cour de cassation d'examiner le recours en révision du procès Dreyfus.
 
29 septembre: Le chef soudanais Samory Touré est capturé par le capitaine Gouraud.
 
4 octobre: Dans le "Journal", Maurice Barrès publie un "état de la question" sur l'affaire Dreyfus. Pour lui, son innocence auquel il croit au fond de lui, est devenue secondaire. "Son pire crime est d'avoir servi pendant cinq ans à ébranler l'Armée et la Nation totale".
 
26 octobre: Le ministère Brisson chute.
 
1er novembre: Charles Dupuy forme son ministère.
 
7 novembre: Marchand reçoit l'ordre du nouveau ministre des affaires étrangères Delcassé,  d'évacuer Fachoda. C'est un camouflet pour l'armée française en pleine affaire Dreyfus et après la défaite de 1870. C'est le prix à payer pour renverser les alliances au profit de l'Angleterre contre l'Allemagne.
 
Delcassé sait que la guerre avec l'Allemagne ne peut être évitée que si la France a des alliés forts comme l'Angleterre et que la recherche d'une alliance avec l'Allemagne ne peut aboutir qu'à ce que l'Allemagne envahisse le territoire national. De retour en France, Marchand sera fêté et applaudi mais il ne veut pas devenir un nouveau Boulanger. Il reste dans le rang sans prêter attention aux manifestations de sympathie qu'il suscite.
 
31 décembre: en réaction à la crise de Fachoda et à la LDH, la Ligue de la Patrie Française est créée par Jules Lemaître, François Coppée et Paul Bourget. Rapidement Maurice Barrès et  Jules Lemaître deviennent les deux têtes pensantes de la ligue. Ils sont de droite, républicains et nationalistes. Bien que la ligue sera dissoute en 1904, son héritage restera au fils de la quatrième et cinquième républiques. La ligue a transformé le nationalisme bonapartiste, en nationalisme républicain. 
1899

10 février: La loi de "dessaisissement" de la Chambre criminelle au profit de l'Assemblée plénière est votée pour examiner la révision de la condamnation de Dreyfus. Le Président de la chambre civile Quesnay de Beaurepaire avait accusé ses collègues de la chambre plénière d'être dreyfusards et avaient démissionné pour devenir le héros des nationalistes. Face à ce nouvel incident, seule l'assemblée plénière pouvait trancher.

16 février: Félix Faure meurt à l'Élysée dans les bras de sa maîtresse, Madame Steinheil, la femme d'un peintre. Sa mort apparaît suspecte pour les nationalistes car attentionné auprès de l'armée et bon cavalier, il est antidreyfusard.

Le médecin arrive à L'Élysée et interroge un garde républicain:
- Il a encore sa connaissance?
Le garde lui répond:
- Je crois bien. Il était quasiment collé à elle.
Il arrive en courant dans le bureau du Président Félix Faure et reformule sa question:
- Il a perdu connaissance?
Le huissier lui répond:
- Elle est sortie par la porte de service !

Les talents buccaux de Madame Steinheil ont provoqué la crise cardiaque du président: "Il voulait être César, il ne fut que Pompée !"

18 février: Émile Loubet est élu à la présidence de la République. Il est coopté par défaut par les radicaux et les socialistes contre Méline. Loubet est un ancien de Panama réfugié au Sénat et dreyfusard. Les nationalistes l'appellent "l'élu des juifs".

 
23 février: Lors des Obsèques nationale de Félix Faure, avec  Guérin et le royaliste Buffet, Déroulède fait une romantique tentative de coup d'État. Il prend par la bride le cheval du général Roget et tente de l'emmener vers l'Élysée. Le général s'y refuse et le fait arrêter. Déroulède est condamné à 10 ans de bannissement. Barrès prend sa défense tout en le déclarant seul responsable pour se disculper. Millerand, alors ministre du commerce intervient pour que Maurice Barrès ne soit pas inquiété. Trois mois plus tard, Déroulède est relâché et banni en Espagne jusque 1905, année où il bénéficiera d'une amnistie. A cause de ce coup d'état, seront aussi bannis l'ancien président du conseil André Buffet et le comte Eugène de Lur Salurces alors propriétaire du château Yquem dans le Bordelais. Les deux royalistes s'exilèrent à Bruxelles. Maurras les interrogea tous deux pour publier "enquête sur la monarchie". Leurs entretiens leur donna l'auréole de maître à penser du royalisme et de l'Action Française.   

21 mars: La Convention franco-anglaise de Londres sur le Soudan égyptien fait renoncer les français au Nil.

3 juin: L'arrêt de révision de l'assemblée plénière de la Cour de cassation renvoie Dreyfus devant  le Conseil de Guerre de Rennes. La révision est obtenu à cause de la diffusion du dossier secret jugé inapplicable au condamné et de l'attribution du bordereau à "un autre officier".
 
4 juin: Le président Loubet est frappé à la tête par le baron Christiani qui est nationaliste, lors du grand steeple-chase d'Auteuil. Christiani écope de 4 ans de prison.
 
5 juin: Suite à l'arrêt de révision, Zola rentre en France.
 
11 juin: En riposte des nationalistes d'Auteuil, des manifestations républicaines de Longchamps soutiennent le Président de la République.
 
12 juin: Le cabinet Dupuy chute.
 
22 juin: Élu par le Boc Républicain, le radical Waldeck-Rousseau forme son ministère.
 
30 juin: Dreyfus arrive en France pour se défendre lors de son second procès.
 
Juillet: Henri Vaugeois fonde l'Action Française avec Charles Maurras.

18 juillet: Esterhazy publie des aveux dans le journal "Le Matin" contre rémunération. Il déclare avoir rédigé le bordereau à la demande de Jean Sandherr (photo à droite) directeur du contre-espionnage militaire français, pour confondre le généralissime Félix Gustave Saussier, qui aurait été la source des informations transmises.

C'est également la thèse de l'historien militaire français Jean Doise qui soutient qu'Esterházy était en fait un agent double utilisé par les services français pour « intoxiquer » les Allemands afin de détourner leur attention au moment précis de la création ultra-secrète du futur canon 75 Modèle 1897. Mais par une enquête implacable, Jean Denis Bredin montre que la réalité est plus prosaïque et qu'Esterházy a tout simplement trahi pour l'argent alors qu'il était criblé de dettes.

9 août: Le général Gallieni, gouverneur général de Madagascar est promu général de division.
 
7 août - 9 septembre: Le Procès de Dreyfus devant le conseil de guerre de Rennes s'ouvre dans une ville en état de siège. Le général Mercier, chef des antidreyfusard se fait huer à la sortie de l'audience. La presse nationaliste et antidreyfusarde se perd en conjectures sur son silence à propos de la «preuve décisive» dont il n'avait cessé de faire état avant le procès, soit le pseudo bordereau annoté par le Kaiser, dont personne ne verra jamais aucune preuve.
Deux anciens ministres de la guerre témoignent contre lui. Le général Mercier et le général Cavaignac défendent l'armée. 
Maître Labori est victime d'un attentat sur son parcours vers le tribunal. Il se fait tirer dans le dos par un extrémiste qui s'enfuit et ne sera jamais retrouvé. L'avocat est écarté des débats pendant plus d'une semaine, au moment décisif de l'interrogatoire des témoins.
 
Après son aveu, Esterhazy n'est pas présent. L'accusation ne tient pas en sa présence qui à elle seule aurait innocenté Dreyfus. La défense ne tenait pas à demander une extradition qui aurait retarder le procès de plusieurs mois voir d'une année. Celui qui s'accuse d'être le rédacteur du bordereau n'est donc même pas convoqué en qualité de témoin !

Dreyfus est reconnu coupable de trahison par 5 voix contre 2 mais «avec circonstances atténuantes», condamné à dix ans de réclusion et à une nouvelle dégradation. Contrairement aux apparences, ce verdict est au bord de l'acquittement à une voix près. Le code de justice militaire prévoyait en effet le principe de minorité de faveur à trois voix contre quatre.

Ce verdict a les apparences d'un aveu coupable des membres du Conseil de guerre. Ils semblent ne pas vouloir renier la décision de 1894, et savent bien que le dossier ne repose sur aucune pièce d'accusation. Cette décision semble aussi un verdict habile, car les juges, tout en ménageant leurs pairs ainsi que les modérés angoissés par les risques de guerre civile, reconnaissent implicitement l'innocence de Dreyfus. Comment trahir avec des circonstances atténuantes?

Le lendemain du verdict, Alfred Dreyfus, après avoir beaucoup hésité, dépose un pourvoi en révision. Waldeck-Rousseau, dans une position difficile, aborde pour la première fois la grâce possible avec la nouvelle décision du Conseil de Guerre. Pour Dreyfus, c'est accepter la culpabilité. Mais à bout de force, éloigné des siens depuis trop longtemps, il accepte.

13 août - 21 septembre: À Paris, Jules Guérin et plusieurs de ses amis de la Ligue antisémite sont assiégés par la police pendant 38 jours dans l'immeuble du 51 de la rue Chabrol. Le "fort Chabrol" est le siège du "Grand Occident de France" adversaire du  "Grand Orient de France" maçonnique. Le préfet Lépine quitte le Conseil d'Etat pour reprendre du service par sympathie pour Waldeck Rousseau. Il dirige le siège policier et laisse pourrir la situation après avoir coupé le ravitaillement, l'eau et le téléphone. Cette aventure antidreyfusarde n'a aucune issue possible. Les antisémites de la ligue de Guérin finissent par se rendre par manque de vivres. Le siège policier fait diversion lors du second procès de Dreyfus. Les ligueurs restent libres à l'exception de Guérin qui sera condamné par la Haute Cour de Justice à dix ans de prison en janvier 1900. Le 14 juillet 1901, sa peine est commuée en bannissement. Il se réfugiera en Belgique. Sa condamnation signe la fin du "Grand Occident de France" et de la ligue antisémite.

Septembre: Le bureau du contre espionnage disparaît au profit de la Sûreté Générale.

19 septembre: Le Président Loubet gracie Dreyfus sur proposition de Waldeck-Rousseau. Auguste Scheurer- Kestner meurt le même jour.

21 septembre: Dreyfus est libéré et peut retrouver sa famille. Son frère Mathieu Dreyfus, le commandant Picquart et Clemenceau lui reprochent de ne pas avoir continué la procédure. Il devait être acquitté. Un goût de "non fini" passe mal. L'affaire n'est pas seulement judiciaire. Elle est aussi politique. Quand Clemenceau arrivera au pouvoir, il la relancera pour obtenir la réhabilitation définitive.

3 - 8 décembre: Le Premier congrès général réunit 1452 organisations socialistes pour poser la question de la participation au Gouvernement. Jules Guesdes qui est contre la participation au Gouvernement s'oppose à Jean Jaurès qui y est favorable.

27 décembre: La loi d'amnistie pour tous les faits relatifs à l'affaire Dreyfus, est votée. Zola en bénéficie.

LA RÉPUBLIQUE ANTICLÉRICALE S'IMPOSE

1900

Janvier: La Dissolution de la congrégation des assomptionnistes, est édictée.

2 mars: Charles Maurras publie sa doctrine "Le nationalisme Intégral" dans la Gazette de France. Le nationalisme intégral est une variante démocratique du solidarisme contre le corporatisme. La société doit disposer d'une hiérarchie sociale, mais que les différentes classes doivent collaborer entre elles. la meilleure institution politique possible pour une nation dépend de son histoire, de sa culture et de son environnement humain. Le nationalisme intégral soutient le localisme, la décentralisation et le principe d'une Église nationale qui se fédère dans l'église universelle.
 
13 mars: La loi Millerand limite la durée de la journée de travail à 10 heures par jour pour les enfants et les femmes et à 12 heures pour les hommes.

1er avril: La réforme de la police prévoit que les policiers pourront porter un revolver.

14 avril: Le Président de la République Loubet inaugure l'Exposition universelle sur les Champs Élysées aux petits et grands palais et sur l'esplanades des invalides au pied de la Tour Eiffel. Le cinématographe de Louis Lumière est présenté. 83000 exposants recevront 50 millions de visiteurs.

22 avril: Le chef indigène Rabah à Kousseri subit une défaite au Cameroun contre les troupes françaises, près de la frontière avec le Tchad.
 
6 mai: Les élections municipales enregistrent le recul des nationalistes aux municipales. Pierre Waldeck Rousseau a réussi à maintenir l’alliance des socialistes, des radicaux et des modérés et gagne les élections.
 
20 mai: Les second jeux olympiques sont inaugurés à Paris.
 
19 juillet: Inauguration du premier métro Vincennes-Porte Maillot à Paris est inauguré . L'ingénieur est Fulgence Bienvenue et l'architecte décorateur est Hector Guimard.
 
Août - septembre: Le contingent français emmené par Marchand participe en Chine à la répression de la révolte des Boxers.
 
14 août:  Pékin est reprise par l'expédition militaire internationale.
 
28-30 septembre: Le Congrès socialiste de la salle Wagram constate la séparation entre Jaurès et Guesde.
 
30 septembre: Une nouvelle loi de Millerand abaisse la durée de la journée de travail pour les hommes de douze heures à onze heures.
 
16 octobre: L'Accord franco-anglais sur la Chine est signé.
 
1er décembre: L'ouverture du barreau aux femmes est votée.
 
16 décembre: Un Accord secret franco-italien sur la Tripolitaine soit la province occidentale de la Libye est signé par échange de lettres.
 
1901

Pour lutter contre la crise qui touche les petits fabricants parisiens de jouets et de quincaillerie, le préfet de police Louis Lépine crée un Concours-Exposition qui deviendra plus tard le Concours Lépine.

24 mars: La France recense 38 962 000 habitants.

26-28 mai: Le congrès du parti socialiste est réuni à Lyon constate la rupture définitive entre Jaurès et Jules Guesde.

21-23 juin: Le congrès de fondation du parti républicain radical réunit le parti radical, le parti radical-socialiste et le parti républicain pour devenir le premier parti de France.

30 juin: L’Union socialiste-révolutionnaire est créé à partir du parti ouvrier français de Jules Guesdes, du parti socialiste-révolutionnaire d'Edouard Vaillant et de l'Alliance communiste pour combattre le ministérialisme prôné par les socialistes réformistes.

1er juillet: La loi sur les associations est votée pour prévoir la liberté complète des associations loi 1901. C'est le premier acte de la séparation de l'Église et de L'État. Les congrégations religieuses doivent quant à elles avoir une autorisation.

20 juillet: Protocole franco-marocain sur la police des frontières est signé.

7 septembre: Le Protocole international sur la Chine, prévoit que les puissances étrangères peuvent installer des bases militaires à Pékin, à Tien-Tsin et dans une partie de la côte est.

Septembre: Les souverains russes sont en visite officiel en France.

23 octobre: L'Alliance républicaine démocratique est fondée autours de l'ingénieur Adolphe Carnot, le frère du président Sadi Carnot. Cette formation de centre droit regroupe les anciens réseaux politiques autour de Jules Ferry, Léon Gambetta ou Léon Say.

1902

21 janvier: Unification de l'heure en France: tout le pays adopte l'heure de Paris.
 
5 février: L'heure de travail est fixée à 9 heures pour les mineurs.
 
24 mars: Jaurès et les réformistes fondent le parti socialiste français.
 
27 avril - 11 mai: Les élections législatives enregistrent une nouvelle victoire du Bloc des gauches avec 465 sièges contre 124 sièges pour la droite.
 
mai: La course cycliste classique Paris Roubaix est créée sur les pavés du nord.
 
8 mai: L'éruption de la montagne Pelée en Martinique provoque 30.000 morts.
 
7 juin: Le Ministère Émile Combes est formé sur les indications de Waldeck Rousseau qui quitte le Gouvernement pour des raisons de santé. Son passé de séminariste lui vaut le surnom de "Père Combes"
 
27 juin: Le décret Combes fait fermé plus de 2500 écoles confessionnelles en France. La loi réduit à 10 heures 30, la journée de travail pour les hommes.
 
28 juin: La Tripe alliance est renouvelée entre l'Angleterre, la France et la Russie.
 
10 juillet: L'accord politique secret entre la France et l'Italie est renouvelée: les deux pays s’engagent à respecter la liberté d’action de chacun en Tripolitaine et au Maroc. L’Italie gardera sa neutralité en cas d’agression directe ou indirecte de l'Allemagne contre la France.
 
27 juillet: Les tenants des écoles confessionnels et leurs adversaires manifestent violemment à Paris. Le préfet de police Lépine envoie la troupe.
 
2 août: Le décret du gouvernement du "père Combes" ordonne la fermeture des congrégations en «situation irrégulière».
Les congrégations sont expulsées hors de France.
 
26-28 septembre: Le parti socialiste de France est fondé par les blanquistes et les guesdistes.

29 septembre: A Paris, Émile Zola meurt asphyxié du fait d'un conduit de cheminée bouchée. Sa femme Alexandrine en réchappe de peu. Victime des ligues antisémites qui enfumaient les dreyfusards pour les faire sortir de leur "terrier" comme des renards. Profitant des travaux sur un toit voisin, comme il s'en est lui-même accusé quelques semaines avant de mourir en 1928, Henri Buronfosse a bouché le conduit de cheminée des Zola. Une enquête réalisée par des policiers anti-dreyfusards, n’aboutit à aucune conclusion.

Carte postale appelée "entier postal" type Moucheron. Le timbre imprimé sur la Carte, est dessiné et gravé par Louis Eugène Moucheron (1843 -1914). le timbre qui porte son nom, représente les Droits de l'Homme. Il s'agit d'un 10 centimes dit type 2 plus orangé que le type 1. Les premières cartes postales avec photo apparaissent dans les années 1880.

Cette carte postale est blanche au verso. Elle est destinée à la correspondance. Sur celle-ci, il s'agit d'une rectification de facture de la part d'une usine de tissus "Collangette et Jame" située à Tarare dans le Rhône, adressée à son fournisseur. Il lui est indiqué qu'il peut réclamer les sommes corrigées à la banque Crédit Lyonnais de Tarare.

Cette carte postale est partie de Tarare le 3 octobre 1902 à 19 heures pour arriver le 5 octobre 1902 à La Longine, jour des obsèques d'Emile Zola. La Longine est un village d'environ 650 habitants, ayant pour activité principal, le tissage de tissus. Le cachet à date est entouré de pointillés destiné aux villages ruraux, alors que le cachet à date de Tarare qui avait environ 12 500 habitants, est un cachet de ville.

5 octobre: Tandis que ses ennemis se réjouissent de ce "fait divers naturaliste", une foule immense où les mineurs du Nord scandent "Germinal", suit le cercueil de l'écrivain vers le cimetière Montmartre. Anatole France qui a exigé que Dreyfus soit présent aux obsèques, alors que le Préfet de police souhaitait son absence "pour éviter les troubles", lit son oraison funèbre devant la tombe de son ami: "Envions-le, sa destinée et son cœur lui firent le sort le plus grand: il fut un moment de la conscience humaine."

1903

Mai: Le ministre des affaires étrangères Delcassé organise la visite officielle du roi d'Angleterre Édouard VII à Paris.

17 mai: Les socialistes s'affrontent contre les catholiques à Paris. Le préfet de police Lépine envoie la troupe pour séparer les manifestants.

1er-19 juillet: Premier tour de France cycliste: au terme d'une course de 2428 km, Maurice Garin remporte la course.

11 juillet: La loi sur l'hygiène dans les ateliers est votée.

6-9 juillet: Le Président de la République Émile Loubet se rend en visite officielle à Londres avec son ministre des affaires étrangères Delcassé qui veut finaliser l'entente cordiale contre l'Allemagne.

Octobre: Le roi d'Italie Victor-Emmanuel III vient en visite officielle à Paris.

1904

Mars: La loi obligeant les écoles privées à fermer dans un délai de 10 ans, est votée.

8 avril: L'Entente cordiale avec la Grande-Bretagne est signée sous l'égide du ministre des affaires étrangères Delcassé. Les français gardent le Maroc et les Anglais l'Égypte.

18 avril: Le premier numéro de l'Humanité de Jean Jaurès parait.

23 avril: Lors de la visite du Président de la République Émile Loubet à Rome, le Vatican proteste en raison de la politique anticléricale du gouvernement français et refuse de le recevoir.

21 mai: L'ambassadeur de France au Vatican est rappelé sans être remplacé.

Juin: Un décret interdit aux ecclésiastiques à se présenter aux épreuves de l'agrégation.
 
7 juillet: La loi interdisant l'enseignement à tous les congréganistes, est votée.
 
30 juillet: La Rupture des relations diplomatiques avec le Vatican est officialisée. À l'origine, le projet de loi de séparation de l'Église et de l'État échaude le pape. Puis Émile Combes, Président du Conseil des Ministres, prétend vouloir nommer les évêques français, sans solliciter le Vatican. Pie X refuse de recevoir à nouveau le Président de la République Émile Loubet. Enfin, le Vatican rappelle 2 évêques français "républicains", pour un entretien sans en informer la France.
 
28 octobre: Le journal Le Figaro révèle l'affaire des fiches. Le ministre de la guerre Louis- Joseph André établit des fiches sur les officiers ayant des pratiques religieuses et les fait étudier par les Francs-Maçons du Grand Orient de France. Dans la pratique, la direction du C.O. (le Conseil de l'Ordre) fait passer une circulaire aux vénérables maîtres (présidents) de chaque loge de cette obédience pour leur demander de rassembler à leur niveau le plus d'informations possibles sur les officiers des garnisons de leurs villes ou départements. Si de nombreux vénérables (généralement ceux des loges bourgeoises modérées qui désapprouvent les excès du combisme) ne donnent pas suite, ne voulant se compromettre dans une opération de "basse politique", d'autres, surtout ceux des ateliers les plus extrémistes (radicaux ou socialistes), se lancent avec enthousiasme dans l'opération par haine du clergé, de la religion ou même de l'armée.
 
Sur les fiches ainsi constituées, on pouvait voir des mentions comme « VLM » pour « Va à la messe » ou « VLM AL » pour « Va à la messe avec un livre ». Les fiches ne se contentent pas de rapporter uniquement des faits comme en témoignent les appellations de "clérical cléricalisant", "cléricafard", "cléricanaille", "calotin pur-sang", "jésuitard", "grand avaleur de bon Dieu", "vieille peau fermée à nos idées", "rallié à la République, n'en porte pas moins un nom à particule". Les fiches rapportent aussi la vie privée ou familiale des officiers: "Suit les processions en civil", "a assisté à la messe de première communion de sa fille", "Membre de la Société Saint-Vincent-de-Paul", "À ses enfants dans une jésuitière", "Reçoit La Croix chez lui", "A qualifié les maçons et les républicains de canailles, de voleurs et de traîtres", "richissime", "a une femme très fortunée", "Vit maritalement avec une femme arabe", "A reçu la bénédiction du pape à son mariage par télégramme".
 
4 novembre: Le député nationaliste Gabriel Syveton qui avait giflé le ministre de la guerre en pleine séance de la chambre est mystérieusement retrouvé mort alors qu'il devait passer le lendemain devant le tribunal correctionnel.  La ligue de la patrie française créée en 1898 ne survit pas Syveton. Elle est dissoute. Jules Lemaître rejoindra l'Action Française.
 
15 novembre: Le général André, ministre de la Guerre, démissionne suite à l'affaire des fiches.
 
1905
10 janvier: Paul Doumer est élu à la présidence de la Chambre des députés.
 
18 janvier: Émile Combes démissionne de la présidence du Conseil suite à l'affaire des fiches.
 
24 janvier: Rouvier forme son deuxième ministère. Aristide Briand entre au Gouvernement.
 
21 mars: La loi réduisant le service militaire à deux ans et le principe de sursis est votée.
 
31 mars: Le Coup de Tanger: Guillaume II se rend à Tanger où il prononce un discours contre la politique française au Maroc. Il réclame une conférence internationale pour décider du sort du Maroc. Guillaume II veut en expulser la France pour laisser la place à l'Allemagne. Le ministre des affaires étrangères Delcassé tente d'interdire la conférence internationale sans y parvenir. Elle se tiendra l'année suivante à Algésiras.
 
23-26 avril: La Fondation du parti socialiste unifié (S.F.I.O.) réunit les partis socialistes sous l'égide de Jean Jaurès.
 
6 juin: Delcassé qui refuse la réunion d’une conférence internationale sur le Maroc, démissionne. Rouvier le remplace lui même et garde la présidence du Conseil.
 
16 juin: La ligne de chemin de fer Paris - Nice est inaugurée par la Compagnie Paris Lyon Méditerranée (PLM).
 
29 juin: La loi de réduction de la journée de travail à huit heures dans les mines, est votée.
 
9 décembre: La loi de séparation des Églises et de l'État est promulguée suite à l'intervention décisive d'Aristide Briand. L’État garantit la liberté de conscience et de culte mais ne subventionne aucun d’entre eux. Les biens des congrégations seront, après inventaire, dévolus à de nouvelles associations cultuelles:

Article 1er: « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes [...] ». Le premier article crée un large consensus. Le texte ne laisse que peu de marge pour son application, par les mots « assure » et « garantit ».

Article 2: « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte [...] »

1906
 
6 janvier - 7 avril: La Conférence Internationale d'Algésiras, est réunie pour déterminer l'avenir du Maroc. Elle confirme l'indépendance du Maroc. Elle rappelle le droit d'accès de toutes les entreprises occidentales à son marché. Toutefois, elle consacre l’influence de la France et de l'Espagne sur une partie du territoire marocain. Les deux États se voient confier la police des ports marocains et un Français est chargé de présider la Banque d'État du Maroc.
 
18 janvier: Armand Fallières est élu Président de la République au premier tour de scrutin, par 449 voix contre 371 à Paul Doumer.
 
11 février: L'Encyclique "Vehementer nos" du pape Pie X condamne la séparation de l'Église et de L'État en France. Les inventaires des immeubles et des meubles des églises en France exigés par le Président de la République, tournent à l'émeute entre catholiques et royalistes d'une part et républicains d'autre part. De nombreux blessés sont comptés dans les deux rangs. Des prêtres, pour éviter les affrontements tout en simulant une vive opposition, attendent les coups de semonce et ouvrent. Certains dévissent les serrures pour que les portes puissent être enfoncées sans trop de dégâts. Ailleurs, les autorités administratives républicaines se contentent d'anciens inventaires.
 
18 février: Rouvier forme son troisième ministère. Clemenceau qui ne subit plus les interdits des Présidents Faure et Loubet, rentre au ministère de l'intérieur, alors qu'il devrait être "en fin de carrière".
 
10 mars: La Catastrophe minière de Courrières fait 1 099 victimes.
 
14 mars : La grève est déclarée à Dourges. Clemenceau fait envoyer la troupe.

14 mars: Suite à la mort de Gery Ghysel causé par l'inventaire de l'église de Boeschepe dans les Flandres le 6 mars, Sarrien forme son ministère. Il sera appelé par les nationalistes "le ministère ça rien".  André Régis blessé le 3 mars en Haute Loire pour défendre une église décèdera trois semaines plus tard.

Clémenceau doit faire arrêter les combats des inventaires. Il déclare au Sénat:
"Nous trouvons que la question de savoir si l'on comptera ou l'on ne comptera pas des chandeliers dans une église, ne vaut pas une vie humaine."
 
7 avril: L'Acte d'Algésiras consacre la victoire de la France sur L'Allemagne. Tanger devient ville internationale, le nord du Maroc est occupé par l'Espagne et le centre par la France. L'Allemagne n'obtient rien.
 
    
6-20 mai: Les élections législatives voient une nouvelle victoire du Bloc de Gauche avec 411 sièges contre 174 sièges pour la Droite.
 
3 juillet: La loi rétablissant le repos hebdomadaire est promulguée.

12 juillet: L'Assemblée plénière de la Cour de Cassation prononce «l'arrêt de réhabilitation du capitaine Dreyfus». Les antidreyfusards crient à la réhabilitation à la sauvette et à la violation de l'article 445 du Code de l'Instruction Criminelle puisque la Cour de cassation juge du droit et non du fait ne renvoie pas au Conseil de Guerre. Ils pensent constater que la Cour de cassation a violé sa propre jurisprudence dans un but non judiciaire mais politique. Mais ce qui est annulé est non seulement l'arrêt de Rennes, mais toute la chaîne des actes antérieurs, à commencer par l'ordre de mise en jugement donné par le général Saussier en 1894. La Cour constate que Dreyfus ne doit pas être renvoyé devant un Conseil de guerre pour la simple raison qu'il n'aurait jamais dû y passer, devant l'absence totale de charges.

«Attendu, en dernière analyse, que de l'accusation portée contre Dreyfus, rien ne reste debout ; et que l'annulation du jugement du Conseil de guerre ne laisse rien subsister qui puisse à sa charge être qualifié crime ou délit ;

Attendu dès lors, que par application du paragraphe final de l'article 445 aucun renvoi ne doit être prononcé.».

Lisez ici la totalité de l'arrêt Dreyfus au format PDF

Par conséquent, en annulant l'acte de mise en accusation, il n'y avait pas lieu de renvoyer Dreyfus  devant une juridiction de jugement et la Cour de Cassation pouvait clore définitivement le débat pour tourner la page définitivement.

21 juillet: Réintégré dans l'armée au poste de commandant mais sans pouvoir prétendre à un grade d'officier général, Dreyfus est décoré de la Légion d'honneur. Le colonel Picquart est réintégré au grade de général de brigade.
 
10 août: Le pape Pie X publie l'Encyclique Gravissimo officii Munere pour interdire aux congrégations de demander l'autorisation  pour créer des associations cultuelles. Monseigneur Duchesnes baptise malicieusement cette Encyclique,  Digitus in oculo soit «doigt dans l'œil».  Comme du fait de l'opposition du pape, les congrégations ne sont pas reconstituées, le "milliard" des congrégations, en réalité 400 millions de francs sont dévolus à l'État français. Lors des inventaires mobiliers , les catholiques se battent avec la police. Le préfet Lépine participe lui même aux combats avec les catholiques.  Clemenceau fera arrêter les inventaires mobiliers source de conflits physiques en déclarant: "un chandelier ne vaut pas mort d'homme".
 
8-14 octobre: Le Congrès de la C.G.T se réunit à Amiens.
 
25 octobre: Clemenceau arrive enfin au pouvoir et forme son premier ministère. Il nomme le général Picquart au poste de ministre de la guerre.

Décembre: Les chemins de fer de l'Ouest sont rachetés par l'État.

"LA BELLE EPOQUE" CONDUIT

A LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE

La fin du XIX e siècle et la première partie du XX e siècle ont été appelées "la belle époque" pour désigner une période ou la douceur de vivre était fondée sur les progrès de la science, qui annonçaient un avenir prometteur. Si la bourgeoisie a profité de cette période, ce ne fut pas le cas pour tout le monde, notamment dans les usines ou les mines de charbon !

1907
L'association des maires de France est créée.

4 mars: L'union Nationale des Étudiants de France (UNEF) est fondée à Lille.

12 mars: L'explosion du cuirassé Iéna dans le port de Toulon met le feu à tout l'arsenal et provoque 118 morts dont sept officiers ainsi que  37 blessés dont l’amiral Henri-Louis Manceron.

17 mars: L’état d’urgence est proclamé en Roumanie.

25 mars: le gouvernement conservateur roumain démissionne et le lendemain le libéral Dimitrie Sturdza prend en main la répression avec le général Alexandru Averescu au ministère de la guerre. L’artillerie est utilisée contre les villages terrorisés par des expéditions punitives. La jacquerie est terminée à la mi-avril, après 12 000 morts.

Le gouvernement roumain est contraint de voter quelques réformes : loi sur les contrats agricoles, loi dite de la « maison rurale » facilitant l’accès à la propriété des paysans pauvres.

Cette carte postée de Roumanie le 23 avril 1907 est arrivée à AArou en Suisse, le 26 avril 1907.

9 juin: La crise viticole est grave. Le midi rouge est en révolte. La troupe a tiré sur la foule lors des manifestations viticoles à Narbonne du 5 mai. Les viticulteurs protestent à Montpellier. Ils sont menées par Marcelin Albert et les viticulteurs minervois qui fondent le "Comité d'Argeliers".

21 juin: Mutinerie du 17e de ligne cantonné à Agde: les soldats pillent une poudrière et marchent sur Béziers pour fraterniser avec les viticulteurs en colère.

23 juin: Clemenceau rencontre Marcelin Albert alors pourchassé par la police et qui se voit refuser l'entrée à la chambre des députés.  Clemenceau le persuade de retourner calmer la rébellion et lui donne un billet de cent francs, qui sera d'ailleurs remboursé, destiné à payer le retour en train. Mais aussitôt Marcelin Albert parti, Clemenceau raconte son histoire à sa façon aux journalistes, insiste sur ce billet, et discrédite adroitement Marcellin Albert, entraînant la colère de ses anciens amis. Le "rédempteur" devient le "vendu" et manque de se faire lyncher. Albert part en Algérie, discrédité et détesté, les vignerons d'Algérie se cotisent pour lui. Il meurt quand même dans la misère.

29 juin: La loi interdisant le mouillage et le sucrage du vin est promulguée et met fin aux révoltes des viticulteurs du Languedoc.
 
15 juillet: La loi sur la circulation des vins et spiritueux est promulguée.
 
3 août: Casablanca est occupé par un corps expéditionnaire français.
 
11-14 août: Le Congrès S.F.I.O se réunit à Nancy.
 
31 août: La Formation de la Triple-Entente entre la France, le Royaume-Uni et la Russie est officielle.
 
8 septembre: L'Encyclique Pascendi de Pie X, signe la condamnation solennelle du modernisme.
 
30 décembre: Les chauffeurs de la Drôme sévissent. Ils brûlent les pieds de leurs victimes pour leur faire avouer où sont cachées leurs économies. Ils tuent la nuit et le jour, reprennent leurs activités de cordonnier ou de maçon. Pour lutter contre cette criminalité, Clemenceau crée douze Brigades Mobiles régionales de police judiciaire. Elles prendront le nom de "Brigade du Tigre". En moins de deux ans, elles totalisent 2 695 arrestations, dont 65 meurtriers, 7 violeurs, 10 faux-monnayeurs, 283 escrocs et 193 cambrioleurs !
 
1908

Janvier-mars: Le général d'Amade occupe la Chaouïa au Maroc malgré les protestations de l'Allemagne.

21 mars: Le n°1 du journal d'extrême droite L'Action Française est publié. Il est tout se suite tiré à 30 000 exemplaires. Trois génies en feront sa réputation: Charles Maurras, Léon Daudet, le fils d'Alphonse Daudet et l'historien Jacques Bainville. Le critique Jules Lemaître les rejoint. Des jeunes gens parmi lesquels les frères Réal del Sarte et les frères Lefèvre vendent le journal à la criée le dimanche à la sortie des Églises.

Par dérision, ils sont appelés "Les Camelots du Roi" puisqu'ils proposent leur marchandise aux passants. Les jeunes militants d'Action Française relèvent le défi et adoptent cette appellation.

10 avril: La loi Ribot-Siegfried sur les habitations à bon marché, est promulguée. Elle crée l'ancêtre des HLM.
 
13 avril: La loi amendée sur la dévolution des biens de l’Église est promulguée.
 
18 mai: Le pourquoi pas ? le navire d’exploration polaire du commandant Charcot est lancé à Saint Malo.
 
4 juin: Les cendres d'Émile Zola sont transférées au Panthéon. Alfred Dreyfus y assiste. Les royalistes y assistent pour insulter le président de la République tout le long le trajet de sa voiture au cri de "A bas Fallières ! A bas Zola !"
Grégory, un collaborateur du journal nationaliste Le Gaulois lui tire deux balles. Dreyfus est légèrement blessé au bras.
 
27-30 juillet: A Draveil et à Villeneuve Saint Georges, des affrontements entre les grévistes et la troupe provoquent plusieurs morts.
 
1er août: En réaction, Clemenceau fait arrêter les dirigeants de la C.G.T.
 
Septembre: Les incidents franco-allemands à Casablanca démontrent que les allemands n'ont pas renoncé au Maroc.
 
14 décembre: Le Journal officiel publie la liste bien incomplète des inventaires des biens de l'Eglise de France. 
 

1909

15 Mars: Première grève générale dans l’administration publique: les agents des PTT, postiers et télégraphistes, exigent une nouvelle réglementation de la profession et la démission de leur ministre de tutelle. Fait marquant, des dames employées au télégraphe et au téléphone participent à la grève qui se prolonge plusieurs jours. Le droit de grève est refusé aux fonctionnaires. Le ministre des PTT Louis Barthou le réaffirme à la Chambre des députés.

18 avril: Jeanne d'Arc est béatifiée par Pie X.

Mai: Une seconde grève des postiers a pour conséquence, de nombreuses sanctions contre les grévistes. Le syndicalisme postier réussit pourtant à s'enraciner.

17 juillet: Léon Jouhaux est élu secrétaire général de la CGT. Il va structurer le syndicat et le garder indépendant des partis politiques malgré les multiples tentatives de la SFIO.

 
20 juillet: Le ministère Clemenceau chute sur les grèves.
 
24 juillet: Aristide Briand forme son ministère.

25 juillet: Louis Blériot traverse la Manche en avion. Louis Blériot décolle au lever du soleil, condition exigée par le journal britannique le Daily Mail qui est à l'origine du défi et qui lui remettra la somme de 25 000 francs or mise en jeu. La traversée s'effectue en 37 minutes, reliant Les Baraques sur la commune de Sangatte, près de Calais et Douvres. Le lieu dit Les Baraques s'appellera plus tard Blériot Plage en son honneur.

22 septembre: A Valence, trois des chauffeurs de la Drome, Octave David, Louis Berruyer et Urbain Liottard sont guillotinés. Le quatrième a échappé à la justice. Au moment de l'exécution, David s'écrit: "Je vais m'enrhumer, salut !"

1910

Janvier-février: La ville de Paris est inondée trois fois par les crues de la Seine. Le zouave du Pont de l'Alma est recouvert d'eau jusqu'à la bouche.

10 février: Le paquebot français le Général Chanzy coule dans l'archipel des Baléares et fait 155 morts.

28 mars: Henri Fabre effectue le premier vol d'un hydravion sur l'étang de Berre.

5 avril: Les lois sur les retraites ouvrières et paysannes sont promulguées. Le départ à la retraire est prévu à 65 ans. Les salariés qui gagnent moins de 3000 Francs par an sont obligés de cotiser à une caisse de retraite.

24 avril - 8 mai: Les Élections législatives enregistrent une nouvelle victoire de la Gauche avec 441 sièges contre la Droite qui a 149 sièges.

25 août: Le pape Pie X condamne la revue catholique sociale Le Sillon créée à la suite de l'Encyclique Rerum Novarum par Marc Sangnier. La revue souhaitée par Léon XIII se dissout elle même sous les reproches de républicanisme et de modernisme de Pie X.

10-17 octobre: Les Grèves des cheminots sont brisés par Aristide Briand.

3 novembre: Aristide Briand donne la démission de son Gouvernement et en reforme un second immédiatement.

1911

28 février: Le ministère Briand chute.

2 mars: Monis forme son ministère.

21 mai: Lors d'un accident sur l'aérodrome d'Issy-les-Moulineaux, le ministre de la guerre  Berteaux, est tué sur le coup et Monis est grièvement blessé.

31 mai: Le premier congrès international de réglementation aérienne se réunit à Paris.

Mai-juin: Menacé par une révolte, le sultan Moulay Abd al Hafid demande à la France de lui prêter main forte. Les troupes françaises occupe alors Fès et Meknès. Ce qui mécontente Guillaume II.

27 juin: Monis démissionne. Joseph Caillaux forme son ministère.

1er juillet: Le Coup d'Agadir: prétendant répondre à un appel à l'aide d'entreprises allemandes de la vallée du Souss alors qu'il n'y a que 4 ressortissants Allemands dans le Souss, l'Allemagne, décide, pour protéger ses intérêts, d'envoyer une canonnière, la "SMS Panther", dans la baie d'Agadir, dont le port est, depuis plus d'un siècle, fermé au commerce étranger.

Le Royaume-Uni se déclare immédiatement en faveur de Paris et menace Guillaume II. Le gouvernement français, soutenu par son opinion, manifeste une très grande fermeté et n'exclut pas une réponse militaire. La France et l'Allemagne sont au bord du conflit.

Joseph Caillaux, conscient du très grave danger qu'une guerre représenterait, préfère négocier. Ces négociations sont conduites, côté Français, par le président du conseil lui même, l'ambassadeur français à Berlin Jules Cambon et le ministre des colonies Albert Lebrun. Côté Allemand, le baron von Lancken, conseiller à l'ambassade d'Allemagne à Paris, représente le Gouvernement Allemand.

28 juillet: Joffre est nommé chef d'état-major général.

22 août: La Joconde est volée au Louvre. Apollinaire est accusé du vol et séjourne inutilement en prison. le chef-d'œuvre de Léonard de Vinci sera retrouvé deux ans plus tard, en Italie. Le voleur est un nationaliste italien qui considère que l'œuvre avait été volée par la France à l'Italie, alors que la France l'avait acquise par un legs volontaire de Léonard de Vinci à François Ier

4 novembre: La Convention franco-allemande sur le Maroc et le Congo est signée. Aux termes d'âpres tractations, l'Allemagne renonce à être présente au Maroc laissant les mains libres à la France, en échange de territoires en Afrique équatoriale plus précisément au Cameroun et au Congo. C'est alors seulement que la canonnière "Panther" quitte la baie d'Agadir. Mais très vite l'opinion allemande s'aperçoit que les négociation n'ont pas été favorables à l'Allemagne: "La France nous donne dix milliards de mouches tsé-tsé"

 
1912

14 janvier: Le ministère Caillaux jugé trop conciliant avec l'Allemagne chute le 13. Il a négocié avec les autorités allemandes par dessus la tête de son ministre des affaires étrangères De Selves qui aurait préféré envoyer une frégate française et une frégate anglaise contre la frégate Panther. Le lendemain, Raymond Poincaré forme son premier ministère.

30 mars: Le Traité de Fès impose le protectorat français au Maroc.

27-28 avril: Bonnot chef de bande d'anarchistes qui ont les premiers braquer des banques dont la Société Générale avec des voitures volées, est localisé par une des brigades du tigre à Choisy le roi. Le préfet de police Lépine dirige lui même l'assaut. Un régiment de zouaves munis d'une mitrailleuse Hotchkiss lui prête main forte devant une foule de badauds. Bonnot sort de temps en temps sur le perron pour tirer. Il est accueilli par des salves de tir mais parvient à s'en sortir indemne. Tandis que la police tergiverse sur la façon de mettre fin au siège, il se désintéresse de ses assaillants pour écrire son testament. Finalement, Louis Lépine décide de faire sauter la maison à la dynamite. Grièvement blessé dans l'explosion, Bonnot termine son testament. Lorsque les policiers donnent l'assaut, il les accueille à coup de revolver avant d'être blessé. Il décède peu après, en arrivant à l'Hôtel Dieu à Paris.

28 avril: Lyautey est nommé résident général au Maroc c’est-à-dire gouverneur du Maroc. La France contrôle désormais plus de la moitié de la côte nord de l'Afrique.
 
22 mai: Paul Deschanel est élu président de la Chambre des députés.
 
Août: Poincaré se rend en visite officielle à Saint-Pétersbourg, pour resserrer l'alliance franco-russe.
 
7 septembre: Le colonel Mangin occupe Marrakech.
 
1913

21 janvier: Raymond Poincaré démissionne pour se présenter à la Présidence de la République. Briand forme son troisième ministère.

17 février: Raymond Poincaré est élu président de la République.

18 février: Briand forme son quatrième ministère.

20 mars: Le ministère Briand chute.
 
22 mars: Barthou forme son ministère.
 
7 août: La loi Barthou fixe la durée du service militaire à 3 années puis 11 ans dans la réserve, 7 ans dans la territoriale et 7 ans dans la réserve de la territoriale.
 
23 septembre: Roland-Garros traverse la Méditerranée en avion en reliant Saint-Raphaël dans le Var à Bizerte, au Nord de la Tunisie soit 730 kilomètres en 7 heures et 53 minutes.

6 novembre: A Saverne en Alsace, le Lieutenant von Forstner, traite les soldats alsaciens de Wackes (voyous) et promet lors d'une séance d'instruction des jeunes recrues, 10 marks par tête à celui qui en poignardera un. Ces faits vont déclencher une crise en Alsace, en France et en Allemagne. Les soldats prussiens ont frappé à coups de crosse des badauds et le lieutenant von Forstner a blessé un infirme d'un coup de sabre à la tête. Le lieutenant von Forstner a exigé une escorte de huit hommes pour aller acheter des chocolats en ville ! Le dessinateur alsacien Hansi en fit cette caricature:

7 décembre: Le ministère Barthou chute.

9 décembre: Doumergue forme son ministère. Caillaux reçoit le portefeuille des finances. Ayant entamé une relation amoureuse avec Henriette alors qu'il est encore marié à Madame Dupré, il l'épouse après son divorce. Il subit alors des attaques politiques dont Le Figaro, dirigé par Gaston Calmette, se fait un relais actif. Le couple en souffre.

1914

13 janvier: La Fédération des gauches est fondé par Briand et Barthou.

16 mars: Calmette publie dans son journal plusieurs courriers privés menaçant la crédibilité et la carrière de Caillaux qui a eu un moment "une double vie".

Henriette Caillaux, décidée à défendre la réputation de son mari, prend rendez-vous avec Calmette à la direction du Figaro. Après quelques mots où Calmette expose qu'il est en possession du rapport du procureur Fabre qui démontre que la magistrature a été noyautée par son mari et des cahiers verts qui démontrent les intrigues de son mari avec les autorités allemandes, elle tire plusieurs balles à bout portant et tue Calmette sur le coup.

21-24 avril: Le roi d'Angleterre, Georges V, est en visite officielle à Paris.

26 avril - 10 mai: Les élections législatives voient encore la victoire de la Gauche et du Centre avec 475 sièges contre la Droite qui a 120 sièges. Les électeurs ont voté contre la guerre.

9 juin: Le Ministère Doumergue chute. Ribot forme un nouveau ministère.

13 juin: Le ministère Ribot chute, Viviani forme son ministère.

28 juin: Attentat de Sarajevo: l'archiduc d'Autriche, François-Ferdinand et son épouse sont assassinés par le jeune nationaliste serbe, Gabriel Princip.

Le voyage de l'Archiduc Héritier du trône autrichien et Inspecteur Général des Armées, est considéré par la minorité serbe comme une provocation. Le jour choisi, 28 juin, est l'anniversaire de la défaite des Serbes à la bataille de Kosovo en 1389 face aux Ottomans.

L'ordre du prince de Montenuovo, grand-maître de la cour, de ne pas rendre les honneurs militaires au couple et de retirer la troupe de 40 000 hommes de Sarajevo prive le couple d'une protection militaire efficace. Le motif est que l'épouse de l'Archiduc, la duchesse de Hohenberg n'est pas membre de la Famille Impériale puisque d'origine nobiliaire trop basse, elle a été écartée à titre personnel, du trône. L'archiduc avait fait un mariage d'amour alors qu'il aurait du épouser une souveraine.

Un premier attentat eut lieu sur le parcours menant à la réception prévue en l'honneur du visiteur princier mais que l'archiduc fit échouer. Il repoussa par réflexe une bombe lancée par un des conjurés. Pendant la réception, il fait part de son mécontentement aux autorités locales puis décide d'aller visiter les victimes à l'hôpital. Le chauffeur commet une erreur d'itinéraire et, sur ordre de l'archiduc, s'arrête au milieu de la foule pour entamer une marche arrière. Il met ainsi involontairement le couple à portée de tir de son assassin qui, après le premier attentat manqué, avait pourtant renoncé.

14 juillet: Jaurès fait un appel contre la guerre: "Ah! croyez vous, tout, tout faire encore pour empêcher cette tuerie ?... D’ailleurs, on nous tuera d’abord, on le regrettera peut-être après".

15 juillet: La loi imposant l'impôt sur le revenu préparé par Caillaux est promulguée.

16 juillet: Le président de la République Poincaré et le Président du Conseil Viviani se rendent en visite officielle en Russie.
 
27 juillet: Les syndicalistes manifestent contre la Guerre.
 
28 juillet: En réaction à l'assassinat de l'archiduc, l'Autriche déclare la guerre à la Serbie.

Après la déposition du Président de la République Poincaré auprès de la Cour d'Assises, Fernand Labori, avocat d'Henriette Caillaux reçoit l'aide du Président de la Cour Albanel. Il soutient Madame Caillaux au point que l'un de ses assesseurs, dira à haute voix: "Monsieur, vous vous déshonorez". Avec Fernand Labori, il réussit à convaincre le jury que le crime n'était pas le fait d'un acte mûrement préparé mais d'un réflexe féminin incontrôlé, transformant le crime prémédité en crime passionnel, et obtient ainsi l'acquittement !

29 juillet: Jaurès se rend à Bruxelles au bureau de la deuxième internationale. La plupart des délégués, dont Hugo Hasse, le co-président du SPD allemand, se disent confiants dans la capacité des peuples à éviter la guerre. Au soir, Jaurès et Rosa Luxembourg sont acclamés lors d’un meeting massif contre la guerre. Le Bureau socialiste international vote à l’unanimité un appel au renforcement des manifestations contre la guerre. L'union de tous les peuples, obligera les Gouvernements à éviter la Guerre.

30 juillet: Allié aux serbes, le tsar Nicolas II décrète la mobilisation générale.

31 juillet: Le jeu de domino commence. L'Ultimatum allemand à l'Angleterre et à la France de rester neutre dans la guerre contre la Russie, ne peut être que refusé par les deux Gouvernements. L'ultimatum à la France est inacceptable. Alors que Viviani, à la demande de Jaurès a fait reculer les troupes de 10 km à l'intérieur du territoire, abandonnant ainsi les défenses de la frontière, Guillaume II réclame Toul et Verdun !

Jean Jaurès est assassiné à 21 h 30, au café du Croissant rue Montmartre à deux pas du siège de son journal l'Humanité. Trois détonations éclatent: deux balles lui perforent le crâne et une l’atteint à la poitrine. Les proches du leader assassiné et les militants socialistes à Paris comme à Carmaux sont bouleversés « Ils ont tué Jaurès » alors que les nationalistes se réjouirent bruyamment.

Le gouvernement se réunit dans la nuit. Il craint des réactions violentes dans les grandes villes et retient dans la capitale deux régiments de cuirassiers, en instance de départ pour la frontière. Cependant, les rapports qu’obtient le ministre de l’Intérieur Louis Malvy lui font estimer que les organisations de gauche ne vont pas déclencher de troubles. Dans le même temps, la direction du Parti socialiste fait savoir qu’elle n’appellera pas à des manifestations.

« L’assassinat de Monsieur Jaurès n’a causé dans les esprits qu’une émotion relative. Les ouvriers, les commerçants et les bourgeois sont surpris douloureusement, mais s’entretiennent beaucoup plus de l’état actuel de l’Europe. Ils semblent considérer la mort de Jaurès comme liée aux évènements actuels beaucoup plus dramatiques. » Xavier Guichard, directeur de la police municipale de Paris, rapport adressé le 1er août 1914 à 10h25 au ministère de l’Intérieur.

Son meurtre précipite le ralliement de la majorité de la gauche française à l'Union sacrée, y compris beaucoup de socialistes et de syndicalistes qui refusaient jusque là, de soutenir la guerre.

Son meurtrier est Raoul Villain, un rémois étudiant en archéologie à l'école du Louvres, né le 19 septembre 1885. Il est adhérent de la Ligue des jeunes amis de l’Alsace-Lorraine, groupement d’étudiants nationalistes, partisans de la guerre et proche de l'Action Française. Arrêté, il déclare avoir agi en solitaire pour «supprimer un ennemi de son pays». Cette curieuse thèse de l’acte isolé est reprise dans l’acte d’accusation dressé le 22 octobre 1915.

Incarcéré pendant toute la guerre, après cinquante-six mois de détention préventive, il est acquitté lors de son procès du 29 Mars 1919. Les jurés estiment qu’il a rendu service à sa patrie: «Si l’adversaire de la guerre, Jaurès, s’était imposé, la France n’aurait pas pu gagner la guerre.». La veuve de Jaurès doit même payer les frais du procès en sa qualité de partie civile ! En réaction, Anatole France écrit : «Travailleurs, Jaurès a vécu pour vous, il est mort pour vous. Un verdict monstrueux proclame que son assassinat n’est pas un crime. Ce verdict vous met hors la loi, vous et tous ceux qui défendent votre cause. Travailleurs, veillez !»

Réfugié à Santa Eulalia à Ibiza, Villain sera surnommé "le fou du port" avant d'être exécuté par les républicains espagnols le 17 septembre 1936 pour avoir espionner au profit de Franco.

1er août: Au matin, le président Poincaré fait porter un message de condoléances à madame Jaurès et le gouvernement fait placarder une affiche condamnant l’assassinat et dans laquelle le président du conseil, rappelant la mémoire du leader disparu, rend hommage, au nom du gouvernement, «au républicain socialiste qui a lutté pour de si nobles causes et qui, en ces jours difficiles, a, dans l’intérêt de la paix, soutenu de son autorité l’action patriotique du gouvernement».

A 14h25, afin de ne pas empêcher le ralliement des ouvriers à la guerre par la décapitation des syndicats, le ministre de l’Intérieur, Louis Malvy, décide, dans un télégramme adressé à tous les préfets, de ne pas utiliser le fameux Carnet B qui, tenu par la gendarmerie, recensait dans chaque département la liste des leaders anarchistes, syndicalistes ou révolutionnaires qui devaient être arrêtés en cas de conflit pour avoir exprimé l’intention d’empêcher l’effort de guerre.

A 16 heures, la France lance l'ordre de mobilisation générale. A 19 heures, L'Allemagne déclare la guerre à la Russie. Le jeu de domino continue.
 
 
2 août: La France décrète l'état de siège.
 
3 août: L'Allemagne déclare la guerre à la France et à la Belgique. Le jeu de domino se termine.
 
4 août: L'Angleterre déclare la guerre à l'Allemagne.
 
11 août: La France déclare la guerre à L'Autriche - Hongrie. Tous les dominos sont tombés !

TÉMOIGNAGES DANS LA LITTÉRATURE ET LA CHANSON

L'affaire Dreyfus

LES DREYFUSARD:

Zola: "Humanité, Vérité, Justice, L'Affaire Dreyfus, Lettre à la Jeunesse" chez Fasquelle à Paris et "La Vérité en marche" chez Fasquelle, 1901. 

Octave Mirbeau: L'affaire Dreyfus publié en 1901 Chez Fasquelle.

Joseph Reinach: Histoire de l'affaire Dreyfus en sept volume. Le premier est sorti en 1901 aux éditions de la revue blanche, les autres sont édités par Fasquelle tome 2 et 3 en 1903, le tome 4 en 1904, le tome 5 en 1905 et les tomes 6 et 7 en 1908.

Léon Blum: souvenirs sur l'affaire chez Gallimard Nrf, 1935.

Jaurès: Les preuves réunissent tous ses articles sur l'affaire dans un fascicule paru à "la petite république".

Clemenceau: Vers la réparation chez Stock en 1899, L'inéquité chez Stock en 1899 et La Honte chez Stock en 1901.

Dreyfus: cinq années de ma vie, 1894 -1899 Chez Charpentier en 1901.

LES ANTIDREYFUSARDS:

Jacques Bainville: La troisième République publié en 1935 chez Fayard.

Charles Maurras: Quand les français ne s'aiment pas publié en 1916.

Léon Daudet: Panorama de la troisième République chez Gallimard en 1936.

LES HISTORIENS:

Jean Denis Bredin: "L'affaire" publié en 1981 chez Julliard.

Pierre Miquel: L’affaire Dreyfus, publié en 1961 aux Presses Universitaires de France - PUF - Collection Que sais-je ?

Robert Le Texier: Le fol été du Fort Chabrol, publié en 1990 aux Editions France - Empire.

CHANSONS

Yves Duteil est un descendant de Dreyfus, lointain arrière arrière petit neveu : en 1997, il chante Dreyfus que vous pouvez écouter sur You Tube

DOCUMENTAIRES :

L'affaire Dreyfus à voir sur You Tube

Les Brûlures de l'Histoire - L'affaire Dreyfus à voir sur You Tube

L'ombre d'un doute - Le dossier secret de l'affaire Dreyfus à voir sur You Tube

Séparation de l'Eglise et de l'Etat

LIVRES :

Patrick Cabanel : 1905, la séparation de l'Eglise et de l'Etat en 30 questions chez Geste Edition

Christian Sorrel : La République contre les congrégations : Histoire d'une passion française 1899-1904, Cerf

DOCUMENTAIRES

La Séparation 1905 Loi de séparation des Eglises et de l'Etat à voir sur You Tube

LES INONDATIONS A PARIS EN 1910 A VOIR SUR You Tube ainsi que sur un second documentaire

La Bande à Bonnot

LIVRES :

Michel Malherbe : La bande à Bonnot

Bernard Thomas : La belle époque de la bande à Bonnot chez Fayard

Frédéric Delacourt : L'affaire de la Bande à Bonnot aux éditions de Vecchi

Charles DIaz : L'épopée de la brigade du tigre chez Calman Levy

CHANSONS

Joe Dassin chante la bande à Bonnot en 1969 que vous pouvez écouter sur You Tube

FILMS

Les brigades du Tigre et la bande à Bonnot et compagnie à voir sur You Tube

Vous pouvez voir aussi les 36 épisodes de la Brigade du Tigre sur You Tube

J'ACCUSE D'EMILE ZOLA

LETTRE A MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

parue dans L'Aurore, le 13 janvier 1898.

Ce qu'on ignore, c'est qu'elles furent d'abord imprimées en une brochure, comme les deux lettres précédentes. Au moment de mettre cette brochure en vente, la pensée me vint de donner à ma lettre une publicité plus large, plus retentissante, en la publiant dans un journal. L'Aurore avait déjà pris parti, avec une indépendance, un courage admirables, et je m'adressai naturellement à elle. Depuis ce jour, ce journal est devenu pour moi l'asile, la tribune de liberté et de vérité, où j'ai pu tout dire. J'en ai gardé au directeur, Monsieur Ernest Vaughan, une grande reconnaissance.

Après la vente de L'Aurore à trois cent mille exemplaires, et les poursuites judiciaires qui suivirent, la brochure resta même en magasin. D'ailleurs, au lendemain de l'acte que j'avais résolu et accompli, je croyais devoir garder le silence, dans l'attente de mon procès et des conséquences que j'en espérais.

Émile Zola

J'ACCUSE

Monsieur le Président,

Me permettez−vous, dans ma gratitude pour le bienveillant accueil que vous m'avez fait un jour, d'avoir le souci de votre juste gloire et de vous dire que votre étoile, si heureuse jusqu'ici, est menacée de la plus honteuse, de la plus ineffaçable des taches?

Vous êtes sorti sain et sauf des basses calomnies, vous avez conquis les coeurs. Vous apparaissez rayonnant dans l'apothéose de cette fête patriotique que l'alliance russe a été pour la France, et vous vous préparez à présider au solennel triomphe de notre Exposition Universelle, qui couronnera notre grand siècle de travail, de vérité et de liberté. Mais quelle tache de boue sur votre nom − j'allais dire sur votre règne − que cette abominable affaire Dreyfus!

Un conseil de guerre vient, par ordre, d'oser acquitter un Esterhazy, soufflet suprême à toute vérité, à toute justice. Et c'est fini, la France a sur la joue cette souillure, l'histoire écrira que c'est sous votre présidence qu'un tel crime social a pu être commis.

Puisqu'ils ont osé, j'oserai aussi, moi. La vérité, je la dirai, car j'ai promis de la dire, si la justice, régulièrement saisie, ne la faisait pas, pleine et entière. Mon devoir est de parler, je ne veux pas être complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de l'innocent qui expie là−bas, dans la plus affreuse des tortures, un crime qu'il n'a pas commis.

Et c'est à vous, monsieur le Président, que je la crierai, cette vérité, de toute la force de ma révolte d'honnête homme. Pour votre honneur, je suis convaincu que vous l'ignorez. Et à qui donc dénoncerai−je la tourbe malfaisante des vrais coupables, si ce n'est à vous, le premier magistrat du pays?

La vérité d'abord sur le procès et sur la condamnation de Dreyfus.

Un homme néfaste a tout mené, a tout fait, c'est le lieutenant−colonel du Paty de Clam, alors simple commandant. Il est l'affaire Dreyfus tout entière; on ne la connaîtra que lorsqu'une enquête loyale aura établi nettement ses actes et ses responsabilités. Il apparaît comme l'esprit le plus fumeux, le plus compliqué, hanté d'intrigues romanesques, se complaisant aux moyens des romans−feuilletons, les papiers volés, les lettres anonymes, les rendez−vous dans les endroits déserts, les femmes mystérieuses qui colportent, de nuit, des preuves accablantes. C'est lui qui imagina de dicter le bordereau à Dreyfus; c'est lui qui rêva de l'étudier dans une pièce entièrement revêtue de glaces; c'est lui que le commandant Forzinetti nous représente armé d'une lanterne sourde, voulant se faire introduire près de l'accusé endormi, pour projeter sur son visage un brusque flot de lumière et surprendre ainsi son crime, dans l'émoi du réveil. Et je n'ai pas à tout dire, qu'on cherche, on trouvera. Je déclare simplement que le commandant du Paty de Clam, chargé d'instruire l'affaire Dreyfus, comme officier judiciaire, est, dans l'ordre des dates et des responsabilités, le premier coupable de l'effroyable erreur judiciaire qui a été commise.

Le bordereau était depuis quelque temps déjà entre les mains du colonel Sandherr, directeur du bureau des renseignements, mort depuis de paralysie générale. Des «fuites» avaient lieu, des papiers disparaissaient, comme il en disparaît aujourd'hui encore; et l'auteur du bordereau était recherché, lorsqu'un a priori se fit peu à peu que cet auteur ne pouvait être qu'un officier de l'état−major, et un officier d'artillerie: double erreur manifeste, qui montre avec quel esprit superficiel on avait étudié ce bordereau, car un examen raisonné démontre qu'il ne pouvait s'agir que d'un officier de troupe.

On cherchait donc dans la maison, on examinait les écritures, c'était comme une affaire de famille, un traître à surprendre dans les bureaux mêmes, pour l'en expulser. Et, sans que je veuille refaire ici une histoire connue en partie, le commandant du Paty de Clam entre en scène, dès qu'un premier soupçon tombe sur Dreyfus. A partir de ce moment, c'est lui qui a inventé Dreyfus, l'affaire devient son affaire, il se fait fort de confondre le traître, de l'amener à des aveux complets.

Il y a bien le ministre de la Guerre, le général Mercier, dont l'intelligence semble médiocre; il y a bien le chef de l'état−major, le général de Boisdeffre, qui paraît avoir cédé à sa passion cléricale, et le sous−chef de l'état− major, le général Gonse, dont la conscience a pu s'accommoder de beaucoup de choses. Mais, au fond, il n'y a d'abord que le commandant du Paty de Clam, qui les mène tous, qui les hypnotise, car il s'occupe aussi de spiritisme, d'occultisme, il converse avec les esprits. On ne saurait concevoir les expériences auxquelles il a soumis le malheureux Dreyfus, les pièges dans lesquels il a voulu le faire tomber, les enquêtes folles, les imaginations monstrueuses, toute une démence torturante.

Ah! cette première affaire, elle est un cauchemar, pour qui la connaît dans ses détails vrais! Le commandant du Paty de Clam arrête Dreyfus, le met au secret. Il court chez madame Dreyfus, la terrorise, lui dit que, si elle parle, son mari est perdu. Pendant ce temps, le malheureux s'arrachait la chair, hurlait son innocence. Et l'instruction a été faite ainsi, comme dans une chronique du XVe siècle, au milieu du mystère, avec une complication d'expédients farouches, tout cela basé sur une seule charge enfantine, ce bordereau imbécile, qui n'était pas seulement une trahison vulgaire, qui était aussi la plus impudente des escroqueries, car les fameux secrets livrés se trouvaient presque tous sans valeur. Si j'insiste, c'est que l'oeuf est ici, d'où va sortir plus tard le vrai crime, l'épouvantable déni de justice dont la France est malade. Je voudrais faire toucher du doigt comment l'erreur judiciaire a pu être possible, comment elle est née des machinations du commandant du Paty de Clam, comment le général Mercier, les généraux de Boisdeffre et Gonse ont pu s'y laisser prendre, engager peu à peu leur responsabilité dans cette erreur, qu'ils ont cru devoir, plus tard, imposer comme la vérité sainte, une vérité qui ne se discute même pas. Au début, il n'y a donc, de leur part, que de l'incurie et de l'inintelligence. Tout au plus, les sent−on céder aux passions religieuses du milieu et aux préjugés de l'esprit de corps. Ils ont laissé faire la sottise.

Mais voici Dreyfus devant le conseil de guerre. Le huis clos le plus absolu est exigé. Un traître aurait ouvert la frontière à l'ennemi pour conduire l'empereur allemand jusqu'à Notre−Dame, qu'on ne prendrait pas des mesures de silence et de mystère plus étroites. La nation est frappée de stupeur, on chuchote des faits terribles, de ces trahisons monstrueuses qui indignent l'Histoire; et naturellement la nation s'incline. Il n'y a pas de châtiment assez sévère, elle applaudira à la dégradation publique, elle voudra que le coupable reste sur son rocher d'infamie, dévoré par le remords. Est−ce donc vrai, les choses indicibles, les choses dangereuses, capables de mettre l'Europe en flammes, qu'on a dû enterrer soigneusement derrière ce huis clos? Non! il n'y a eu, derrière, que les imaginations romanesques et démentes du commandant du Paty de Clam. Tout cela n'a été fait que pour cacher le plus saugrenu des romans−feuilletons. Et il suffit, pour s'en assurer, d'étudier attentivement l'acte d'accusation, lu devant le conseil de guerre.

Ah! le néant de cet acte d'accusation! Qu'un homme ait pu être condamné sur cet acte, c'est un prodige d'iniquité. Je défie les honnêtes gens de le lire, sans que leur coeurs bondisse d'indignation et crie leur révolte, en pensant à l'expiation démesurée, là−bas, à l'île du Diable. Dreyfus sait plusieurs langues, crime; on n'a trouvé chez lui aucun papier compromettant, crime; il va parfois dans son pays d'origine, crime; il est laborieux, il a le souci de tout savoir, crime; il ne se trouble pas, crime; il se trouble, crime. Et les naïvetés de rédaction, les formelles assertions dans le vide! On nous avait parlé de quatorze chefs d'accusation: nous n'en trouvons qu'une seule en fin de compte, celle du bordereau; et nous apprenons même que les experts n'étaient pas d'accord, qu'un d'eux, Monsieur Gobert, a été bousculé militairement, parce qu'il se permettait de ne pas conclure dans le sens désiré. On parlait aussi de vingt−trois officiers qui étaient venus accabler Dreyfus de leurs témoignages. Nous ignorons encore leurs interrogatoires, mais il est certain que tous ne l'avaient pas chargé; et il est à remarquer, en outre, que tous appartenaient aux bureaux de la guerre. C'est un procès de famille, on est là entre soi, et il faut s'en souvenir: l'état−major a voulu le procès, l'a jugé, et il vient de le juger une seconde fois.

Donc, il ne restait que le bordereau, sur lequel les experts ne s'étaient pas entendus. On raconte que, dans la chambre du conseil, les juges allaient naturellement acquitter. Et, dès lors, comme l'on comprend l'obstination désespérée avec laquelle, pour justifier la condamnation, on affirme aujourd'hui l'existence d'une pièce secrète, accablante, la pièce qu'on ne peut montrer, qui légitime tout, devant laquelle nous devons nous incliner, le bon Dieu invisible et inconnaissable! Je la nie, cette pièce, je la nie de toute ma puissance! Une pièce ridicule, oui, peut−être la pièce où il est question de petites femmes, et où il est parlé d'un certain D... qui devient trop exigeant: quelque mari sans doute trouvant qu'on ne lui payait pas sa femme assez cher. Mais une pièce intéressant la défense nationale, qu'on ne saurait produire sans que la guerre fût déclarée demain, non, non! C'est un mensonge! et cela est d'autant plus odieux et cynique qu'ils mentent impunément sans qu'on puisse les en convaincre. Ils ameutent la France, ils se cachent derrière sa légitime émotion, ils ferment les bouches en troublant les coeurs, en pervertissant les esprits. Je ne connais pas de plus grand crime civique.

Voilà donc, monsieur le Président, les faits qui expliquent comment une erreur judiciaire a pu être commise; et les preuves morales, la situation de fortune de Dreyfus, l'absence de motifs, son continuel cri d'innocence, achèvent de le montrer comme une victime des extraordinaires imaginations du commandant du Paty de Clam, du milieu clérical où il se trouvait, de la chasse aux «sales juifs», qui déshonore notre époque.

Et nous arrivons à l'affaire Esterhazy. Trois ans se sont passés, beaucoup de consciences restent troublées profondément, s'inquiètent, cherchent, finissent par se convaincre de l'innocence de Dreyfus.

Je ne ferai pas l'historique des doutes, puis de la conviction de Monsieur Scheurer−Kestner. Mais, pendant qu'il fouillait de son côté, il se passait des faits graves à l'état−major même. Le colonel Sandherr était mort, et le lieutenant−colonel Picquart lui avait succédé comme chef du bureau des renseignements. Et c'est à ce titre, dans l'exercice de ses fonctions, que ce dernier eut un jour entre les mains une lettre−télégramme, adressée au commandant Esterhazy, par un agent d'une puissance étrangère. Son devoir strict était d'ouvrir une enquête.

La certitude est qu'il n'a jamais agi en dehors de la volonté de ses supérieurs. Il soumit donc ses soupçons à ses supérieurs hiérarchiques, le général Gonse, puis le général de Boisdeffre, puis le général Billot, qui avait succédé au général Mercier comme ministre de la Guerre. Le fameux dossier Picquart, dont il a été tant parlé, n'a jamais été que le dossier Billot, j'entends le dossier fait par un subordonné pour son ministre, le dossier qui doit exister encore au ministère de la Guerre. Les recherches durèrent de mai à septembre 1896, et ce qu'il faut affirmer bien haut, c'est que le général Gonse était convaincu de la culpabilité d'Esterhazy, c'est que le général de Boisdeffre et le général Billot ne mettaient pas en doute que le bordereau ne fût de l'écriture d'Esterhazy. L'enquête du lieutenant−colonel Picquart avait abouti à cette constatation certaine. Mais l'émoi était grand, car la condamnation d'Esterhazy entraînait inévitablement la révision du procès Dreyfus; et c'était ce que l'état−major ne voulait à aucun prix.

Il dut y avoir là une minute psychologique pleine d'angoisse. Remarquez que le général Billot n'était compromis dans rien, il arrivait tout frais, il pouvait faire la vérité. Il n'osa pas, dans la terreur sans doute de l'opinion publique, certainement aussi dans la crainte de livrer tout l'état− major, le général de Boisdeffre, le général Gonse, sans compter les sous−ordres. Puis, ce ne fut là qu'une minute de combat entre sa conscience et ce qu'il croyait être l'intérêt militaire. Quand cette minute fut passée, il était déjà trop tard. Il s'était engagé, il était compromis. Et, depuis lors, sa responsabilité n'a fait que grandir, il a pris à sa charge le crime des autres, il est aussi coupable que les autres, il est plus coupable qu'eux, car il a été le maître de faire justice, et il n'a rien fait. Comprenez−vous cela! Voici un an que le général Billot, que les généraux de Boisdeffre et Gonse savent que Dreyfus est innocent, et ils ont gardé pour eux cette effroyable chose! Et ces gens−là dorment, et ils ont des femmes et des enfants qu'ils aiment!

Le lieutenant−colonel Picquart avait rempli son devoir d'honnête homme. Il insistait auprès de ses supérieurs, au nom de la justice. Il les suppliait même, il leur disait combien leurs délais étaient impolitiques, devant le terrible orage qui s'amoncelait, qui devait éclater, lorsque la vérité serait connue. Ce fut, plus tard, le langage que Monsieur Scheurer− Kestner tint également au général Billot, l'adjurant par patriotisme de prendre en main l'affaire, de ne pas la laisser s'aggraver, au point de devenir un désastre public.

Non! Le crime était commis, l'état−major ne pouvait plus avouer son crime. Et le lieutenant−colonel Picquart fut envoyé en mission, on l'éloigna de plus en plus loin, jusqu'en Tunisie, où l'on voulut même un jour honorer sa bravoure, en le chargeant d'une mission qui l'aurait sûrement fait massacrer, dans les parages où le marquis de Morès a trouvé la mort. Il n'était pas en disgrâce, le général Gonse entretenait avec lui une correspondance amicale.

Seulement, il est des secrets qu'il ne fait pas bon d'avoir surpris.

A Paris, la vérité marchait, irrésistible, et l'on sait de quelle façon l'orage attendu éclata. M. Mathieu Dreyfus dénonça le commandant Esterhazy comme le véritable auteur du bordereau, au moment où Monsieur Scheurer−Kestner allait déposer, entre les mains du garde des Sceaux, une demande en révision du procès. Et c'est ici que le commandant Esterhazy paraît. Des témoignages le montrent d'abord affolé, prêt au suicide ou à la fuite. Puis, tout d'un coup, il paye d'audace, il étonne Paris par la violence de son attitude. C'est que du secours lui était venu, il avait reçu une lettre anonyme l'avertissant des menées de ses ennemis, une dame mystérieuse s'était même dérangée de nuit pour lui remettre une pièce volée à l'état−major, qui devait le sauver. Et je ne puis m'empêcher de retrouver là le lieutenant−colonel du Paty de Clam, en reconnaissant les expédients de son imagination fertile. Son oeuvre, la culpabilité de Dreyfus, était en péril, et il a voulu sûrement défendre son oeuvre. La révision du procès, mais c'était l'écroulement du roman− feuilleton si extravagant, si tragique, dont le dénouement abominable a lieu à l'île du Diable! C'est ce qu'il ne pouvait permettre. Dès lors, le duel va avoir lieu entre le lieutenant−colonel Picquart et le lieutenant−colonel du Paty de Clam, l'un le visage découvert, l'autre masqué. on les retrouvera prochainement tous deux devant la justice civile. Au fond, c'est toujours l'état−major qui se défend, qui ne veut pas avouer son crime, dont l'abomination grandit d'heure en heure.

On s'est demandé avec stupeur quels étaient les protecteurs du commandant Esterhazy. C'est d'abord, dans l'ombre, le lieutenant−colonel du Paty de Clam qui a tout machiné, qui a tout conduit. Sa main se trahit aux moyens saugrenus. Puis, c'est le général de Boisdeffre, c'est le général Gonse, c'est le général Billot lui−même, qui sont bien obligés de faire acquitter le commandant, puisqu'ils ne peuvent laisser reconnaître l'innocence de Dreyfus, sans que les bureaux de la guerre croulent dans le mépris public. Et le beau résultat de cette situation prodigieuse est que l'honnête homme, là− dedans, le lieutenant−colonel Picquart, qui seul a fait son devoir, va être la victime, celui qu'on bafouera et qu'on punira.

O justice, quelle affreuse désespérance serre le coeur! On va jusqu'à dire que c'est lui le faussaire, qu'il a fabriqué la carte−télégramme pour perdre Esterhazy. Mais, grand Dieu! pourquoi? dans quel but? donnez un motif. Est−ce que celui−là aussi est payé par les juifs? Le joli de l'histoire est qu'il était justement antisémite. Oui! nous assistons à ce spectacle infâme, des hommes perdus de dettes et de crimes dont on proclame l'innocence, tandis qu'on frappe l'honneur même, un homme à la vie sans tache! Quand une société en est là, elle tombe en décomposition.

Voilà donc, monsieur le Président, l'affaire Esterhazy: un coupable qu'il s'agissait d'innocenter. Depuis bientôt deux mois, nous pouvons suivre heure par heure la belle besogne. J'abrège, car ce n'est ici, en gros, que le résumé de l'histoire dont les brûlantes pages seront un jour écrites tout au long. Et nous avons donc vu le général de Pellieux, puis le commandant Ravary, conduire une enquête scélérate d'où les coquins sortent transfigurés et les honnêtes gens salis.

Puis, on a convoqué le conseil de guerre.

Comment a−t−on pu espérer qu'un conseil de guerre déferait ce qu'un conseil de guerre avait fait?

Je ne parle même pas du choix toujours possible des juges. L'idée supérieure de discipline, qui est dans le sang de ces soldats, ne suffit−elle à infirmer leur pouvoir d'équité? Qui dit discipline dit obéissance. Lorsque le ministre de la Guerre, le grand chef, a établi publiquement, aux acclamations de la représentation nationale, l'autorité de la chose jugée, vous voulez qu'un conseil de guerre lui donne un formel démenti?

Hiérarchiquement, cela est impossible. Le général Billot a suggestionné les juges par sa déclaration, et ils ont jugé comme ils doivent aller au feu, sans raisonner. L'opinion préconçue qu'ils ont apportée sur leur siège, est évidemment celle−ci: «Dreyfus a été condamné pour crime de trahison par un conseil de guerre, il est donc coupable; et nous, conseil de guerre, nous ne pouvons le déclarer innocent; or nous savons que reconnaître la culpabilité d'Esterhazy, ce serait proclamer l'innocence de Dreyfus.» Rien ne pouvait les faire sortir de là.

Ils ont rendu une sentence inique, qui à jamais pèsera sur nos conseils de guerre, qui entachera désormais de suspicion tous leurs arrêts. Le premier conseil de guerre a pu être inintelligent, le second est forcément criminel. Son excuse, je le répète, est que le chef suprême avait parlé, déclarant la chose jugée inattaquable, sainte et supérieure aux hommes, de sorte que des inférieurs ne pouvaient dire le contraire.

On nous parle de l'honneur de l'armée, on veut que nous l'aimions, la respections. Ah! certes, oui, l'armée qui se lèverait à la première menace, qui défendrait la terre française, elle est tout le peuple, et nous n'avons pour elle que tendresse et respect. Mais il ne s'agit pas d'elle, dont nous voulons justement la dignité, dans notre besoin de justice. Il s'agit du sabre, le maître qu'on nous donnera demain peut−être. Et baiser dévotement la poignée du sabre, le dieu, non!

Je l'ai démontré d'autre part: l'affaire Dreyfus était l'affaire des bureaux de la guerre, un officier de l'état−major, dénoncé par ses camarades de l'état−major, condamné sous la pression des chefs de l'état−major.

Encore une fois, il ne peut revenir innocent sans que tout l'état−major soit coupable. Aussi les bureaux, par tous les moyens imaginables, par des campagnes de presse, par des communications, par des influences, n'ont−ils couvert Esterhazy que pour perdre une seconde fois Dreyfus. Quel coup de balai le gouvernement républicain devrait donner dans cette jésuitière, ainsi que les appelle le général Billot lui−même ! Où est−il, le ministère vraiment fort et d'un patriotisme sage, qui osera tout y refondre et tout y renouveler? Que de gens je connais qui, devant une guerre possible, tremblent d'angoisse, en sachant dans quelles mains est la défense nationale!

Et quel nid de basses intrigues, de commérages et de dilapidations, est devenu cet asile sacré, où se décide le sort de la patrie!

On s'épouvante devant le jour terrible que vient d'y jeter l'affaire Dreyfus, ce sacrifice humain d'un malheureux, d'un «sale juif»! Ah! tout ce qui s'est agité là de démence et de sottise, des imaginations folles, des pratiques de basse police, des moeurs d'inquisition et de tyrannie, le bon plaisir de quelques galonnés mettant leurs bottes sur la nation, lui rentrant dans la gorge son cri de vérité et de justice, sous le prétexte menteur et sacrilège de la raison d'État!

Et c'est un crime encore que de s'être appuyé sur la presse immonde, que de s'être laissé défendre par toute la fripouille de Paris, de sorte que voilà la fripouille qui triomphe insolemment, dans la défaite du droit et de la simple probité. C'est un crime d'avoir accusé de troubler la France ceux qui la veulent généreuse, à la tête des nations libres et justes, lorsqu'on ourdit soi−même l'impudent complot d'imposer l'erreur, devant le monde entier. C'est un crime d'égarer l'opinion, d'utiliser pour une besogne de mort cette opinion qu'on a pervertie jusqu'à la faire délirer. C'est un crime d'empoisonner les petits et les humbles, d'exaspérer les passions de réaction et d'intolérance, en s'abritant derrière l'odieux antisémitisme, dont la grande France libérale des droits de l'homme mourra, si elle n'en est pas guérie. C'est un crime que d'exploiter le patriotisme pour des oeuvres de haine, et c'est un crime, enfin, que de faire du sabre le dieu moderne, lorsque toute la science humaine est au travail pour l'oeuvre prochaine de vérité et de justice.

Cette vérité, cette justice, que nous avons si passionnément voulues, quelle détresse à les voir ainsi souffletées, plus méconnues et plus obscurcies! Je me doute de l'écroulement qui doit avoir lieu dans l'âme de Monsieur Scheurer−Kestner, et je crois bien qu'il finira par éprouver un remords, celui de n'avoir pas agi révolutionnairement, le jour de l'interpellation au Sénat, en lâchant tout le paquet, pour tout jeter à bas. Il a été le grand honnête homme, l'homme de sa vie loyale, il a cru que la vérité se suffisait à elle− même, surtout lorsqu'elle lui apparaissait éclatante comme le plein jour. A quoi bon tout bouleverser, puisque bientôt le soleil allait luire? Et c'est de cette sérénité confiante dont il est si cruellement puni. De même pour le lieutenant− colonel Picquart, qui, par un sentiment de haute dignité, n'a pas voulu publier les lettres du général Gonse.

Ces scrupules l'honorent d'autant plus que, pendant qu'il restait respectueux de la discipline, ses supérieurs le faisaient couvrir de boue, instruisaient eux−mêmes son procès, de la façon la plus inattendue et la plus outrageante. Il y a deux victimes, deux braves gens, deux coeurs simples, qui ont laissé faire Dieu, tandis que le diable agissait. Et l'on a même vu, pour le lieutenant−colonel Picquart, cette chose ignoble: un tribunal français, après avoir laissé le rapporteur charger publiquement un témoin, l'accuser de toutes les fautes, a fait le huis clos, lorsque ce témoin a été introduit pour s'expliquer et se défendre. Je dis que ceci est un crime de plus et que ce crime soulèvera la conscience universelle. Décidément, les tribunaux militaires se font une singulière idée de la justice.

Telle est donc la simple vérité, monsieur le Président, et elle est effroyable, elle restera pour votre présidence une souillure. Je me doute bien que vous n'avez aucun pouvoir en cette affaire, que vous êtes le prisonnier de la Constitution et de votre entourage. Vous n'en avez pas moins un devoir d'homme, auquel vous songerez, et que vous remplirez. Ce n'est pas, d'ailleurs, que je désespère le moins du monde du triomphe. Je le répète avec une certitude plus véhémente: la vérité est en marche et rien ne l'arrêtera. C'est d'aujourd'hui seulement que l'affaire commence, puisque aujourd'hui seulement les positions sont nettes: d'une part, les coupables qui ne veulent pas que la lumière se fasse; de l'autre, les justiciers qui donneront leur vie pour qu'elle soit faite. Je l'ai dit ailleurs, et je le répète ici: quand on enferme la vérité sous terre, elle s'y amasse, elle y prend une force telle d'explosion, que, le jour où elle éclate, elle fait tout sauter avec elle. on verra bien si l'on ne vient pas de préparer, pour plus tard, le plus retentissant des désastres.

Mais cette lettre est longue, monsieur le Président, et il est temps de conclure.

J'accuse le lieutenant−colonel du Paty de Clam d'avoir été l'ouvrier diabolique de l'erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d'avoir ensuite défendu son oeuvre néfaste, depuis trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus coupables.

J'accuse le général Mercier de s'être rendu complice, tout au moins par faiblesse d'esprit, d'une des plus grandes iniquités du siècle.

J'accuse le général Billot d'avoir eu entre les mains les preuves certaines de l'innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de s'être rendu coupable de ce crime de lèse− humanité et de lèse−justice, dans un but politique et pour sauver l'état−major compromis.

J'accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s'être rendus complices du même crime, l'un sans doute par passion cléricale, l'autre peut−être par cet esprit de corps qui fait des bureaux de la guerre l'arche sainte, inattaquable.

J'accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d'avoir fait une enquête scélérate, j'entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité, dont nous avons, dans le rapport du second, un impérissable monument de naïve audace.

J'accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard, d'avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu'un examen médical ne les déclare atteints d'une maladie de la vue et du jugement.

J'accuse les bureaux de la guerre d'avoir mené dans la presse, particulièrement dans L'Éclair et dans L'Écho de Paris, une campagne abominable, pour égarer l'opinion et couvrir leur faute.

J'accuse enfin le premier conseil de guerre d'avoir violé le droit, en condamnant un accusé sur une pièce restée secrète, et j'accuse le second conseil de guerre d'avoir couvert cette illégalité, par ordre, en commettant à son tour le crime juridique d'acquitter sciemment un coupable.

En portant ces accusations, je n'ignore pas que je me mets sous le coup des articles 3O et 31 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881, qui punit les délits de diffamation. Et c'est volontairement que je m'expose.

Quant aux gens que j'accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n'ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l'acte que j'accomplis ici n'est qu'un moyen révolutionnaire pour hâter l'explosion de la vérité et de la justice.

Je n'ai qu'une passion, celle de la lumière, au nom de l'humanité qui a tant souffert et q u a droit au bonheur.

Ma protestation enflammée n'est que le cri de mon âme. Qu'on ose donc me traduire en cour d'assises et que l'enquête ait lieu au grand jour!

J'attends.

Veuillez agréer, monsieur le Président, l'assurance de mon profond respect.

LIENS EXTERNES

L'AFFAIRE DREYFUS

Dreyfus raconté en détail: http://judaisme.sdv.fr/perso/dreyfus/affaire.htm

Dreyfus vu à l'Assemblée Nationale: http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/Dreyfus/dreyfus-chrono.asp

La Ligue des Droits de l'Homme: http://www.ldh-france.org/

Dreyfus au musée du judaïsme: http://dreyfus.mahj.org/docs/liens.php

LA RÉPUBLIQUE ANTICLÉRICALE

La Séparation de l'Église et de l'État: http://www.eglise-etat.org/separation.html

La catastrophe de la Montagne Pelée: http://decobed.club.fr/pelee.html

Pie X et ses Encycliques: http://www.fatima.be/fr/pontife/index.php et http://www.vatican.va/holy_father/pius_x/encyclicals/index_fr.htm

VERS LA GUERRE

La crise du Maroc: http://www.mtholyoke.edu/acad/intrel/boshtml/bos137.htm

La révolte viticole: http://www.bruno.trinquier.com/1907/1907.html

Les camelots du roi: http://www.camelotsduroi.fr/

L'Action française: http://www.actionfrancaise.net/

Sangatte Blériot plage: http://www.ville-sangatte.fr/

Biographie de Blériot: http://beh.free.fr/npc/hcel/bleriot.html

Les inondations de Paris 1910: http://lefildutemps.free.fr/crue_1910/ et http://cartespostales.free.fr/Sommaire.htm

La bande à Bonnot: http://rebellyon.info/article42.html

L'affaire de Salerne: http://thierry.heitmann.free.fr/saverne/affaire.htm

Document audio sur François Ferdinand: http://www.canalacademie.com/Francois-Ferdinand-d-Autriche.html

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